lundi 5 décembre 2011

Utiliser son sens de la répartie : quand la vie te donne une deuxième chance

Il y a quelques jours, il est arrivé quelque chose de vraiment déprimant et injuste à Grande-Dame.

Lisez, lisez, vous aussi aurez la veine qui palpite dans le front à force d'être en beau joualvert. Et ça vous aidera à vous mettre en contexte pour ce billet ci. Quand la bêtise et la mesquinerie sont au rendez-vous, je ne suis pas très belle à voir, et vraiment très très laide à entendre.

Qui plus est, ça a fait remonter dans ma mémoire cette anecdote un tantinet ahurissante.

J'avais été bénévole pour un salon de l'environnement, il y a quelques années de cela. Fin novembre, à la salle d'expo de ma ville. Endroit où se tenait aussi le salon des artisans, à l'époque, environ dans les mêmes dates.

Je suis postée à la table d'accueil, là où les gens payent leur entrée. Arrive une dame, la soixantaine, la tenue chic, le cheveux teint. Me donne son 5 $ pour faire le tour du Salon de l'environnement. Le truc est placardé en gros, en vert flash, à tous les 3 cm. Des kiosques d'éoliennes, d'association de sauvegarde de milieux humides, de vêtements recyclés, de bacs à compost, d'organisme qui dépolluent les rivières remplissent la salle.

Pas l'ombre d'un artisan dans la place, ou si peu. Plutôt, des dépliants et des powerpoint qui expliquent la mission environnementale de tout un chacun.

La gente dame (!) me revient quoi, une heure plus tard, profondément perplexe et vexée dedans son coeur. Coudonc, c'est pas le Salon des artisans ici? Redonnez-moi mon 5 $. Etc.

Et moi de refuser. Et de lui dire qu'elle aurait pu s'en rendre compte plus tôt, que c'était indiqué partout et que de toute façon, le montant symbolique de l'entrée va à la belle et noble cause environnementale.

Et elle de me répondre qu'elle s'en fiche tu de l'environnement, et tourne les talons, outrée, furax, mauvaise et enlaidie par le dégoût profond d'avoir côtoyé une heure dans sa vie des granos débiles qui veulent sauver le monde. Sans aucun préjugé, là, bien entendu!

Et moi de res-pi-rer.

J'haguiiiiiiiiiiiis les conflits. Je viens toute croche, toute frissonnante d'anxiété. Je ne gère vraiment pas bien les émotions négatives devant public qui font que je fais un métier derrière l'écran d'ordi, ce qui me convient parfaitement et épargne mes pauvres nerfs. Je n'aime pas pantoute le service à la clientèle, surtout quand le client est pas content. Mais bon, je me ressaisis, la journée n'est pas finie.

Les jours passent, deux semaines en fait, et je reçois l'appel d'une représentante de ma compagnie d'assurance-hospitalisation, qui doit passer chez moi pour percevoir mon versement annuel. Elle passera le lendemain.

Le lendemain, qui c'est que je retrouve sur le pas de ma porte? La méchante sorcière du salon de l'environnement. Oui, oui, la Médame!

Depuis quand, au juste, la vie nous redonne une deuxième chance de mettre les points sur les "i"? Depuis mon tout jeune âge, quand je me froisse avec un inconnu, je reste là bouche bée avec mon sens de la répartie embarré dans mes talons. Les répliques que j'aimerais lui foutre au dentier ne me poppent en tête que des heures après l'incartade. Sur le coup, j'ai l'air d'un poulp surgelé qui ne maîtrise pas plus de trois mots de vocabulaire. C'est tout juste si je ne m'excuse pas d'être venue au monde.

Mais là, la Vilaine est là devant moi. On se reconnaît, mais je suis en territoire connu et pas elle. Je lui remémore là où on s'est rencontrées et son visage se tord dans un rictus pas beau et pas gentil.

Alors dans tout son professionnalisme, la dame me balance qu'elle est encore en /"W$%/$! d'avoir laissé son 5 $ à une cause perdue.

Et de mon côté, autant je la trouve tarte exposant douze de replonger dans le vif du sujet et de ne pas me dire "D'accord madame, ça fait partie de notre vie personnelle mais je suis ici dans un but professionnel alors taisons l'anecdote", autant je profite de l'occasion, trop belle, pour lui dire tout ce que j'ai eu le temps de mijoter depuis ces deux dernières semaines.

Elle rétorque, argumente et n'abandonne pas. D'un fatalisme totalement accablant, la vipère. J'espère sincèrement ne pas vieillir comme elle, et m'y applique tous les jours en fait, tellement elle m'a dégoûtée ce jour-là, avec son indifférence devant la vie, son pas-d'espoir et son attitude de "anyway, on va tous mourir".

Quand je referme la porte, presque sur elle (pas pressée d'aller digérer ailleurs sa potée d'injures, apparemment), je suis bouleversée, mais satisfaite. Je lui ai dit ce que j'avais à dire.

Cinq ans plus tard, je n'en reviens toujours pas que le hasard ait remis cette femme si remplie de mauvaise foi sur ma route. Je suis remplie de gratitude envers la vie d'avoir pu ENFIN, POUR UNE FOIS utiliser mon argumentation de vive voix auprès de la principale concernée. Même si de toute évidence, ça lui passait quelques kilomètres au-dessus de sa belle permanente cognac aux reflets aubergine et tout le fixatif tenant la chose bien en place. J'avais pour ma part la conscience plus tranquille.

Et pour la petite histoire, j'ai appelé le directeur de ladite compagnie d'assurance, j'ai écrit une lettre de plainte contre cette représentante si peu professionnelle, et je n'ai plus jamais repris d'assurance-hospitalisation depuis.

Tu vois, Grande-Dame, ce genre de mochitude arrive plus souvent qu'on s'imagine. Mais je parie que ton tour est passé. Et bon, si jamais ça se reproduit, je compte sur toi pour passer à l'Ordure en question tout un savon. Tu en fabrique de si bons!

mercredi 14 septembre 2011

Confidences d'une télocheless

On n'a plus la télé depuis le passage au numérique.

...

C'est drôle comme personne dans la maisonnée n'en souffre. Nous sommes passé de deux ou trois chaînes semi-enneigées au néant télévisuel et c'est comme s'il ne s'était rien passé du tout.

Pas que j'aie envie de vous servir ce grand classique hautain de "Ah, nous, la télé, nous trouvons ça insignifiant". Mais non. Je ne suis pas si vertueuse que ça, voyons.

En fait j'aime bien la regarder, la tivi. Nous avons même déjà été abonnés au câble quelques mois et j'affectionnais, je l'avoue, ces émissions de déco, de métamorphoses et d'accouchements que mon Homme trouve teeeeellement, mais tellement nulles. J'en conviens, c'est abominablement cucul, mais quel bon divertissement de temps à autres!

L'abondance de chaînes créée chez moi une légère dépendance à la téloche. Pour moi, ouvrir la télé, c'est aussi ouvrir toute grande la porte du garde-manger passé 20 h et me garocher pathétiquement dans les grignotines. C'est me coucher plus tard aussi, souvent pour un truc pas particulièrement pertinent mais bon, je veux voir comment ça se termine bien que je le sache depuis la toute première seconde du générique du début. Et en bout de ligne, c'est être moribonde le lendemain matin, aux aurores avec mes deux minuscules personnalités matinales.

La tivi, ici, c'est le vice. Nous devenons mous, lâches et patates de sofa devant le petit écran. Pas très jojo, le portrait robot de mon illustre moi-même affalé devant la boîte à images. La bave qui coule, l'oeil injecté de sang, le derrière qui élargit, c'est un peu tout ça pour moi, l'excès de tivi.

Je ne m'aime pas beaucoup dans mon rôle de victime de la dictature télévisuelle, alors arrière Satan, le cablômachin, et exit jusqu'à l'idée même de la soucoupe atomique qui nous relie avec les satellites de la Nasa et ses milliards de posssssssssses de TV qui, au final, nous remâchent en continu la même soupe fade, tiède et réchauffée. Aime mieux investir le 55 % de mon salaire dans mes futures armoires de cuisine.

Avec notre desserte télévisuelle minimale, mon intérêt pour les documentaires scientifiques un tantinet vulgarisés, les reportages à saveur sociale, les émissions de cuisine, le bulletin de nouvelle de fin de soirée et les souvent excellentes séries télé trouve généralement son compte.

À vrai dire, quand nous n'avons que deux ou trois possibilités d'émission, je trouve beaucoup plus facile de me contenir. Je ne pense pas souvent à m'incliner dans mon divan, si ce n'est que pour mettre un Passe-Partout à Babou ou pour synthoniser Télé-Québec, le temps d'entretenir les griffes acérées de Petit Frère (l'image dans le caisson l'immobilise pendant deux ou trois minutes, tout au plus).

Depuis quinze jours donc, il neige à plein ciel dans notre ancêtre cathodique. L'Homme a tout de même tenu à nous procurer le convecteur temporel qui convertira le signal analogique avec le mode numérique. Je n'y comprends rien.

Et n'eut été de Cornemuse et autres émissions pour enfants qui amusent Babou une ou deux fois par semaine, je crois bien que j'aurais très bien survécu sans ce qui encombre un coin de mon salon.

J'ai l'air d'une sainte comme ça, mais ne m'enlevez pas mon accès Internet!

mardi 13 septembre 2011

Tel quel

Enceinte de Babou, j'étais pleine d'idées préconçues à propos de mon bébé à naître. D'abord, nous avions choisi de ne pas en connaître le sexe d'avance. Pfff, pas besoin d'une échographie pour me dire que je portais un garçon! J'en étais si convaincue que j'en rêvais plusieurs fois par mois. L'éventualité d'avoir une fille ne m'avait même pas effleuré l'esprit. Ou si peu, le temps de choisir un prénom au cas où...

La suite m'apprit que mon instinct de femme enceinte n'était vraiment pas infaillible. J'avais bel et bien une merveilleuse petite fille dans les bras et cette nouvelle perspective m'enorgueillissait presque à l'excès.

Ma fille, à deux secondes de vie, était déjà la réplique miniature de son papa. Elle l'est encore ceci dit, physiquement du moins. Dans cette optique, j'entrevoyais dès sa naissance des moments.... essoufflants. L'Homme, de l'énergie, il en a à revendre. Il m'est donc apparu inévitable que ma petite reproduise le modèle tornade-tourbillon-centrifugeuse de son paternel.

Les mois passèrent. Je m'attendais tellement à avoir engendré un petit monstre que nous fûmes, l'Homme et moi, complètement décontenancés de l'attitude de Babou lors de ses premières visites au parc.

Cette mini-fourmi, elle n'avait pas un an qu'elle pointait du doigt la lune, examinait délicatement les fleurs et restait plantée là à regarder courir, hurler et s'ébattre les autres amis du parc.

Où était la petite terreur que j'appréhendais? J'avais envie de voir ma fille faire le tour du parc en quatrième vitesse en s'époumonant. Au lieu de l'empêcher de débouler le talus sur son legging blanc cassé, je devais lui pousser dans le dos pour qu'elle daigne essayer une seule fois le trampoline, la glissade, la balançoire soucoupe.

Incrédules, l'Homme et moi avons mis ce comportement contemplatif sur le compte du jeune âge de notre demoiselle. Elle est encore petite, elle n'est pas solide sur ses jambes, elle aime regarder les autres enfants pour apprendre... Persuadée étais-je qu'un jour, je devrais la ramasser in extremis en plein sprint au beau milieu de la rue ou encore, perchée sur la corniche du garage.

Dans le champ étais-je sur toute la ligne. Nous avons finalement décrété, il y a deux ou trois jours à peine, que notre Babou n'est pas et ne sera jamais un petit paquet de nerfs pas tenable. J'en ai eu la certitude samedi dernier, alors que j'étais seule au parc avec mes deux matelots.

Lasse et fatiguée, j'avais simplement installé Petit Frère dans la balançoire et pour une fois, j'ai fiché la paix à Babou. Fais ce que tu veux, ma tourterelle, moi je donne une poussée à l'heure à Petit Frère en regardant voler les mouches.

Babou a farfouillé dans les cailloux. Regardé et commenté un match de tennis amical. Cueilli des fleurs en me parlant (encore) du gâteau d'anniversaire de ses rêves. Mangé une collation assise près de moi. Puis, elle est allée examiner de plus près une petite fille qui jouait avec son papa. Elle ne s'est pas jointe à eux, mais les a bien observé. Est revenue en trottinant vers nous. A enlevé-remis-enlevé-remis ses sandales -- il y avait des roches dedans. A constaté à voix haute qu'une dame et un monsieur d'un certain âge se balançaient dans les balançoires de grandes personnes.

Et pendant tout ce temps, je laissais aller. Terminé, la maman fatigante, la g.o. du tout inclus qui insiste pour que son enfant performe dans toutes les structures et modules de jeux du parc de quartier. Fini, l'espoir ridicule et inutile de voir son enfant devenir la petite tannante du parc que tous ont envie d'envoyer sur Mercure en forfait aller-simple.

Ai-je vraiment espéré un jour avoir une gamine turbulente au lieu de ma délicate poupette béate de contemplation? Elle a du frère Marie-Victorin dans le nez celle-là, et alors, tant mieux! Qu'avais-je donc à souhaiter autre chose pour ce trésor avec lequel je vis depuis deux ans et demi?

Petit Frère, lui, regardait sa biscotte et se balançait tout peinard en m'inondant les oreilles de "boua boua boua boua", le babil de l'heure sous nos latitudes. Rien ne laisse présager que cet angélique poupon incarnera la tempête que sa soeur n'est finalement pas. Un ciel bleu, un oiseau qui passe, un moteur de tondeuse à gazon et un craquelin et mon gamin a tout pour être heureux pour de très très longues minutes.

Hier soir, à l'heure du bain, à ce propos, l'Homme a dit cette sage parole. "On ne peut pas les changer". Nos enfants. Ils sont comme ils sont un point c'est tout, depuis la seconde où ils sont conçus. C'est bien parfait comme ça. Et de toute façon, j'adore les surprises.

lundi 12 septembre 2011

Voir le positif

J'ai reçu un merveilleux bouquet de fleurs ce matin. Ma grande amie S. qui ne tarissait pas d'éloges sur ce blogue. Sur la parentalité que je raconte ici, et surtout, sur ma façon positive de mettre en mots les anecdotes et observations que j'en tire.

Ces compliments m'émeuvent profondément. Parce qu'au quotidien, il m'arrive au moins une fois par jour de réciter mon chapelet -- et pas nécessairement pieusement -- en marchant sur un coin de jouet, en relavant des draps de pipi pourtant nettoyés la veille, en faisant encoooooooore une fois la satanée vaisselle quand je n'ai qu'une envie, aller me rouler en boule avec les moutons de poussière qui roulent sous mon lit défait. Seule. Tranquille.

Dans mon sempiternel vêtement mou -- uniforme de mon congé de maternité -- je me sens souvent triste et moche. Mon bébé est mignon à croquer et cumule exploits et grandes premières, et ma fille, parlons-en, elle ne cesse de me surprendre par son vocabulaire riche et sa prodigieuse capacité à jouer avec les mots à deux ans et demi. N'empêche, parfois, même en leur si délicieuse présence je m'ennuie! Je m'ennuie de discuter avec une copine, d'échanger d'égal à égal. Ça me manque, voilà tout!

Parfois aussi, ma descendance me tombe royalement sur les nerfs. Quand ça ne sieste pas longtemps. Quand l'un réveille l'autre. Quand ça hurle pour obtenir un verre d'eau et que dès qu'on leur tend, ça nous le jette au visage parce que pas de la bonne couleur. Quand ça ne veut pas sortir dehors et que ça lambine en mettant ses bottes à l'envers en guise de protestation. Quand ça ne veut plus rentrer dans la maison et que ça se laisse choir sur la galerie. Quand ça chigne pour être dans les bras et que, une fois dans les bras, ça tortille pour retourner chigner par terre.

Et il y a le couple dans tout ça! Vous savez, cette notion floue et vague qu'on perd si facilement de vue quand le fruit de notre union nous siphonne jusqu'au dernier millilitre d'énergie! L'Homme, avec lequel je m'obstine si souvent! Mon Homme si volontaire, si présent, si impliqué, si polyvalent-bricoleur-drôle-affectueux-sportif-débrouillard!

Parfois, c'est en nous disant exactement la même chose dans des mots différents que nous nous prenons la tête, mais nous ne nous en rendant pas compte parce que trop interrompus par une couche à changer, un jouet brisé à réparer illico sous peine de crise d'apoplexie, une urgence collation et tous les décibels que ces situations ô combien pluriquotidiennes engendrent.

Alors voilà, malgré tout ça, si ici, c'est un portrait positif de ma situation familiale que je dépeins, je crois avoir bien à mon propre insu réussi un de mes défis de vie, soit de toujours tenter de tourner la situation, si pénible, navrante, éreintante soit-elle, en positif. Mission accomplie!

mercredi 7 septembre 2011

Héréditaire gourmandise

Je passe beaucoup de temps dans la cuisine. Par nécessité, par plaisir, par obligation, par inspiration. Pour remplir les quatre bedons de la maison, pour me changer les idées, pour ne pas que "ça" pourrisse dans le potager.

Mon homme aussi sait quoi faire avec un tablier, une casserole et une cuiller de bois. Et depuis quelques mois, une mini apprentie nous assiste.

Cette môme, elle adore tout ce qui se rapporte de près ou de loin à la nourriture. De l'aliment-jouet en plastique (elle en a reçu tout un assortiment à son anniversaire et depuis, j'en retrouve jusque dans mon panier à linge sale) à la spatule (je dois l'empêcher de dormir avec), du pinceau à badigeonner (elle prend son bain avec) aux napperons, de la menthe qui pousse à côté de la galerie aux livres de recettes que je feuillette avec elle de temps à autres, en quête d'idées nouvelles. Et elle commente les photos : "C'est bon!" ou "J'aime çââââ!".

À la garderie, Babou redemande quotidiennement une double et parfois, une triple ration. Sais pas où elle met tout ça, ma filiforme fillette, mais elle MANGE.

Et quand elle ne mange pas, elle parle de nourriture. Elle s'imagine toutes sortes de gâteaux d'anniversaire, de tartes des plus insolites, de bonbons qui n'ont rien à envier aux dragées surprise de Berthie Crochue.

Quand nous revenons en marchant de la garderie, pour passer le temps, nous dressons des listes d'épicerie imaginaires. Babou est toujours partante pour m'énumérer tous les aliments de son répertoire, où les pâtes, le brocoli et le gâteau se disputent la première marche du podium.

Disparates sont ses goûts. Je ne m'étonne même plus de la voir me réclamer une troisième sardine, une tranche supplémentaire de fromage bleu, des montagnes de cerises de terre ou un bol de zestes de citron. Se gavait de parmesan Reggiano à même pas 10 mois, cette coccinelle. A découvert l'univers des poissons en goûtant à du maquereau des Îles-de-la-Madeleine, ma sauterelle.

Gourmande. Curieuse de goûter, mon exploratrice du garde-manger.

Ce que ça donne?

Une influence positive pour son plus grand fan. Petit Frère, de sa chaise haute, examine avec un intérêt tangible le contenu de nos assiettes. Ma main au feu qu'il sera une aussi bonne fourchette que sa-soeur-son-idole. Je le vois aux transes qu'il nous fait quand on lui donne à manger, à l'agilité avec laquelle il se nourrit lui-même déjà, oui oui, jusqu'aux grains de riz qu'il pince entre son minuscule index et son mignonissime petit pouce.

Et chaque jour, je bénis et mon existence, et le fait d'avoir sous mon toit de si beaux enfants qui mordent à belles dents dans ce que je prends plaisir à cuisiner.

lundi 15 août 2011

La complicité

Elle en aura mis, du temps, Babou, pour digérer la présence de Petit Frère.

Dans les tous premiers jours de notre vie à quatre, j'ai eu droit à la froideur et à l'amertume d'un petit coeur brisé de 20 mois et demi. J'étais, les hormones aidant, en miettes. Avec l'impression de devoir quêter l'amour de ma petite fille, de la réapprivoiser, de me plier en quatre pour qu'elle comprenne que mon amour pour elle -- inconditionnel -- était inversement proportionnel au temps que je pouvais désormais lui consacrer.

Puis, à force d'efforts, au fil des jours, Babou a bien vu que Maman était toujours là pour elle, moyennant un peu de patience et d'autonomie. Pour elle, j'avais multiplié les petits moments de qualité. Bains ensemble, sorties au parc avec Petit Frère qui dormait dans la poussette-traîneau, histoires et jeux sitôt qu'il faisait la sieste. Tout ça a bien entendu contribué à rassurer Babou.

Tellement que j'ai eu rapidement l'impression de déshabiller Jacques pour habiller Jean, laissant parfois Petit Frère poireauter pendant que je divertissais sa grande soeur, ou accourait avec elle 36 fois par jour à la salle de bain pour prioriser son apprentissage de la propreté. Combien de tétées ai-je ainsi interrompues abruptement pour m'éviter des flaques de pipi à ramasser!

Découvrant par le fait même que mon Bb2 s'endurait nettement plus longtemps seul que ma première née, et que la simple présence d'une aînée en orbite autour de lui occupait fort bien mon poupon pendant de longues minutes.

Pendant les tous premiers mois de Petit Frère, Babou ne lui a jamais vraiment porté attention. Tout au plus un petit bisou par ci par là. Ou parfois, une petite marque de colère ou de jalousie, en bousculant les choses lui appartenant. C'est à ces signes que nous voyions qu'elle l'avait encore un brin de travers, Petit Frère.

Puis elle s'est mise à me demander où il était, quand celui ci était en sieste.

Puis je l'ai surprise à le faire rire à table, à le narguer gentiment avec sa biscotte en auto, à lui redonner compulsivement sa suce (qui semble être aimantée au plancher).

Puis à l'inclure systématiquement dans son énumération des membres de la famille. Papa, Maman, Petit Frère et Babou.

Quand on demande à Babou si elle souhaite qu'on garde Petit Frère, elle répond "oui" sans hésiter. Et nous regarde comme si nous avions eu la pire idée qui soit!

Hier, l'Homme s'affairait dans la cave. La petite jouait non loin de lui. Je devais aller chercher mon linge sur la corde avant que le ciel ne lui tombe dessus, alors j'ai amené Petit Frère jouer près de sa grande soeur.

Il y est resté près d'une heure. Les deux petits s'amusant ensemble en harmonie. Nous entendions de petits éclats de rire de bébé de temps à autres, à travers l'intarissable monologue bal-princesse-gâteau d'anniversaire-camping de Babou. J'ai même surpris Babou sur le vif, en plein flagrant délit de bisous sur la tête de Petit Frère, aussi ravi que surstimulé.

À 8 mois et demi, Petit Frère semble soudainement être devenu le complice officiel de sa grande soeur. Longue vie à ce lien privilégié propre à la fraternité!

vendredi 8 juillet 2011

La lettre d'amour

C'était une journée d'hiver. J'avais les yeux tuméfiés par mes nuits trop courtes. Mon bébé tout neuf flottait encore dans son habit de neige rouge 0-12 mois, c'est dire comme il était petit.

J'allais, comme toujours quand elle s'y rendait, chercher ma « grande fille » à la garderie vers les 16 h, en priant pour qu'elle soit déjà habillée, déjà en train de jouer dehors. La corvée de l'habillage de ma récalcitrante-presque-deux-ans-en-réaction-à-son-cadet, je pouvais très bien m'en passer.

Mais ce soir-là, les amis de la garderie n'étaient pas encore prêts à sortir. Je suis donc entrée avec le poupon dans un bras, prête au corps-à-corps quotidien du « je t'habille tu tortilles ».

C'est quelque part entre la jambe de salopette tournée à l'envers, l'enfant qui se laisse choir dans la flaque de neige fondue et le foulard égaré que l'éducateur de Babou m'a demandé de rédiger, pour le lendemain, un petit mot à ma fillette. Pour souligner la journée de l'enfant, ou de la famille, je ne me souviens plus trop bien.

Moui, bon, d'accord -- veux-tu te tenir debout saint-/$%"/%!"/Q%"/, reprends ta suce toi, oui tu as chaud mon amour, maman aussi, vite on sort -- je vais tout faire pour y penser! promis-je.

Quelque part en soirée, j'ai réussi à le coucher sur papier, ce petit mot de trois lignes et demi.

Ma chère petite Babou,
J'aimerais te dire à quel point je suis fière d'être ta maman. Tu mets beaucoup de soleil dans ma vie. Tu es drôle, coquine et tellement intelligente. Tu nous surprends toujours avec ton imagination. Je suis contente que tu t'intéresses à ton petit frère. Maman est choyée d'avoir d'avoir une petite fille comme toi. Je t'aime ma belle Titi d'amour,
Maman É.
XXX

J'ai, pour compléter le tout, apposé un petit autocollant de chien dans le bas à gauche.

Du plus loin que je me souvienne, j'ai adoré écrire. J'ai cette facilité avec les mots, ce don qui fait que sans effort, j'amène mon lectorat ailleurs - au pays des grandes émotions - pour pas un rond. J'en ai fait ma profession, armée de mon baccalauréat en rédaction.

Mais là, avec cette toute petite lettre de trois sous, tellement courte, tellement simplette, tellement composée sur le coin de la table par une maman agonisante de sommeil, tellement rédigée avec un stylo anonyme sur un bloc note recyclé, avec des mots si peu recherchés, j'ai tout de même tapé dans le mille.

Le lendemain, à la garderie, les éducateurs ont lu à chacun des amis la lettre d'amour rédigée par leurs parents. Les enfants étaient, semblent-ils, excessivement ravis et fiers. Ils ont en échange bricolé une enveloppe pour y ranger leur souvenir. Qui trône depuis dans la bibliothèque de la chambre de grande fille.

Ma puceronne conserve précieusement ce qu'on appelle entre nous « La lettre d'amour ». Ma théorie? Ce mot est probablement arrivé à point dans sa toute nouvelle vie de grande soeur, dans cette période pas si lointaine où elle apprenait à la dure qu'un petit garçon gros comme un pou qui lui avait chipé sa place.

À l'occasion, à l'heure du dodo, après les livres et les berceuses, Babou me demande de la lui lire, la lettre d'amour. Puis elle me l'enlève des mains en chuchotant « j'ai capable » et elle se met à réciter à voix toute basse les petites phrases qui lui sont destinées.

Et systématiquement, je fonds.



lundi 4 juillet 2011

Défi culinaire

Quand elle part en vacances, la famille de mon frère me lègue toujours ce qui, dans son frigo, est sur le bord de se perdre. Ils savent que j'ai un don pour redonner vie et corps à tout ce que le flétrissement et la péremption menace.

La dernière livraison date de vendredi. On y trouvait :

-du persil
-un paquet de roquette
-un reste de compote de rhubarbe
-deux oignons verts
-une demi-tomate
-un demi-pot de tomates en conserve maison
-un demi-pot de yogourt nature
-un fond de pot de yogourt à la vanille
-du lait, du jus de tomate
-de la trempette du commerce
-une lime dézestée
-de la sauce tomate
-des raisins rouges
-une pointe de tarte aux fraises

Avec ces derniers éléments, j'ai réussi à concocter :

-une salade de roquette dans sa plus simple expression
-une salade verte (oignons verts, jus de lime)
-du taboulé (persil)
-une soupe aux légumes (tomates en conserve et tomate fraîche)
-des muffins aux bleuets/framboise (yogourt vanille et nature)
-un pouding aux fruits (compote de rhubarbe)
-des sloppy joe (sauce tomate)

Tous les autres aliments ont été mangés ou bus tels quels.

Rien ne s'est perdu.

Je suis vraiment encore et toujours une championne de la gestion de frigo. Qui ose se mesurer à moi?

Cette maison

Nous l'avons achetée il y a trois ans. Un duplex datant de 1951. Le logement du bas avait été habité par une dame âgée (mais décédée au moment de l'achat) et celui du haut, par sa fille et sa petite-fille.

Pas que je veuille dire que les femmes sont nulles dans l'entretien d'une maison au sens large (rénos et tout le bazar), mais notre première maison avait, lors de la prise de possession, grandement besoin d'amour.

Avec quels yeux avons-nous visité cette demeure? Je me le demande encore. Le logement du bas était presque vide. La peinture des murs était défraîchie, écalée, démodée. Les luminaires étaient vieux et moches. Et pourtant...

Dans la salle de bain, on voyait bien que la vanité et la toilette étaient à changer au plus-que-sacrant. Et qu'il n'y avait ni ventilateur de salle de bain, ni prise de courant -- pas très pratique pour se sécher les cheveux. Et pourtant...

La cuisine... sujet douloureux. Pas de place. Une cuisine laboratoire à la mode des années 1950, une dépense comme on disait autrefois, ne pouvant contenir qu'une dévouée personne à la fois -- en l'occurrence Bobonne comme c'était d'usage à l'époque. Petit, exigu, non-standard. Une hotte d'un autre temps, faisant plus de vacarme que d'aspiration des vapeurs de cuisson. Pas d'entrée de lave-vaisselle et pas d'espoir d'en installer un portatif. Rien pour mettre en appétit la passionnée des casseroles que j'incarne. Et pourtant...

Dans la cave, il y avait cette indésirable odeur d'humidité pas chouette du tout. Celle que tous les aspirants acheteurs redoutent. Et nous nous doutions bien que l'isolation des murs de la fondation ne valait pas une tortilla et qu'il faudrait tout se retaper le boulot. Le coin laveuse-sécheuse, toujours dans la cave, était peu pratique et mal fichu (la sortie de sécheuse mesurait environ 15 mètres et était remplie de coudes, de joints et d'angles à 45 degrés). Il fallait tout relocaliser, beau contrat de plomberie en perspective. Et pourtant...

Un des deux réservoirs à eau chaude arrivait en fin de vie. À changer donc, et comme rien n'est simple, il fallait le relocaliser lui aussi car nous souhaitions que les deux réservoirs soient côte-à-côte, ce qui n'était visiblement pas un souci pour l'installateur initial. Et pourtant...

Le réservoir de mazout... âge-canonique, défraîchi, rouillé. Il n'était plus assurable, énorme et mal situé. Qui plus est, il aurait fallu être plus que téméraire pour le faire remplir -- gare aux déversements fâcheux et aux interminables emmerdes inhérentes avec le MDDEP et je ne sais qui encore. Et pourtant...

Les marches d'escalier pour se rendre au logement du dessus n'étaient plus que dentelle de bois. Nous redoutions les fissures dans la fondation (qui se sont avérées existantes, trois fois plutôt qu'une). Le garage n'avait pas tellement fière allure. Nous n'avions pas de locataires en vue et nous devrions en trouver. Et pourtant...

Nous avions tous deux de nouveaux emplois temporaires et/ou contractuels à court terme, pas un sou de côté....

Mais de la naïveté, nous aurions pu en revendre! Et nous avons acheté le duplex.

Et nous y avons emménagé. Je suis tombée enceinte de Babou le soir même de notre déménagement. Ce n'était pas dans les plans. Et pourtant...

Et pourtant, tout s'est arrangé. Petit à petit, nous avons (lire : IL a) effectué presque tous les travaux nous-mêmes. Avec l'aide d'amis, de parents, de professionnels parfois.

J'ai de la veine, l'Homme est un infatigable bricoleur, génie inventif et recycleur acharné.

Et puis, les enfants nous ont donné ce fabuleux coup de pied au derrière/sentiment d'urgence qui nous font régler les problèmes, petits et grands, rondement.

Rien n'est parfait. Nous avons encore une liste affolante de choses à changer, de projets à concrétiser.

Actuellement, la cuisine est dans la mire. Objectif : tout arracher. Tout refaire à neuf. On ne peut pas agrandir, mais on peut rendre plus moderne et plus fonctionnel. Peu importe le prix, ou presque. Ce projet m'enivre et j'ai espoir de m'endormir, au courant des prochains mois, au son du doux ronronnement d'un lave-vaisselle. Musique divine pour mes mains décapées par cette corvée répétitive que je ne pourrai supporter à mon retour au travail, dans quelques mois.

Elle n'est pas parfaite cette maison, mais on s'y sent bien et nous prenons plaisir et fierté à la voir se transformer sous les mains habiles de l'Homme.

Notre aspirateur central -tout nouvellement installé- n'a qu'à bien se tenir!

lundi 6 juin 2011

Poser des questions, un signe d'intelligence

J'ai dernièrement regardé le film Incendies, qui m'a émue et beaucoup plu. Le lendemain du visionnement, je suis allé lire quelques critiques de ce film et j'ai pu découvrir une multitude d'opinions post visionnement.

Beaucoup ont adoré, plusieurs ont trouvé l'oeuvre très ordinaire. Chacun ses goûts.

Un commentaire a cependant attiré mon attention. La personne qui l'avait rédigé n'avait visiblement pas du tout saisi le dénouement du film (qui, pour ceux qui ne l'ont pas vu, est assez bouleversant). Cette personne demandait donc aux autres internautes de lui expliquer ce qu'elle n'avait pas saisi.

J'ai eu envie, durant une seconde, de juger cette personne. Le dénouement m'avait tellement soufflée, tellement sauté aux yeux! Puis j'ai lu les deux réponses que des internautes avaient laissé à ce commentaire de prime abord surprenant.

La première réponse était quelque chose dans le style de « franchement, faut-il être sot pour ne pas avoir compris, à votre place j'irais me cacher. » J'exagère un peu, mais c'était dans cet esprit. J'ai eu un malaise en lisant ce commentaire plutôt méchant et gratuit, et je n'ai visiblement pas été la seule puisque ce même commentaire cheap shot a inspiré une autre réponse, tout à fait différente.

Le deuxième internaute, fin pédagogue, a gentiment expliqué, décortiqué la fin de l'intrigue. Sans jugement, sans mépris, sans prétention. Comme l'aurait fait un aimable professeur en répétant pour la troisième fois l'explication d'un problème de mathématique fort simple, mais qu'un élève n'aurait toujours pas saisi.

Qui que soit cet internaute, je lui lève mon chapeau.

Pour toutes ces fois où, en classe, je n'ai pas compris la matière et que je n'ai pas levée ma main, par peur d'être jugée.

Pour toutes ces occasions de prendre la parole que je n'ai pas saisies par crainte d'une répartie cinglante, d'un dénigrement public.

Je sais maintenant qu'il n'y a pas de honte à ne pas avoir compris. Il y en a cependant -- et beaucoup -- à ne pas vouloir expliquer.

lundi 16 mai 2011

Maman à la maison, une vocation

J'ai eu la chance, enfant, d'avoir une maman à la maison. Pour elle, ça ne devait pas être rose bonbon tous les jours mais pour nous, ses rejetons, ce fut tout un privilège.

C'est probablement grâce au statut de mère au foyer de ma maman que je sais comment recoudre un bouton, repriser les chaussettes, plier décemment les draps contour, faire un bouillon de poulet qui se respecte et me servir d'un coupe-pâte (chose qu'on ne voit plus tellement dans les cuisines d'ailleurs, vous en avez un, vous?).

Pour ma maman, être à la maison n'était pas une punition. Nous étions quatre enfants alors elle avait amplement de quoi s'occuper du matin au soir. Elle vaquait à ses tâches en chantant, tout le temps, tant et si bien que j'avais cette impression qu'elle se réalisait pleinement dans ce rôle que j'en suis venue à idéaliser.

Jusqu'à ce que ce choix -- car contrairement à ma mère, pour l'époque dans laquelle je vis ma maternité, il s'agit bel et bien d'un choix -- s'impose à moi. J'ai longuement hésité, car j'avais beaucoup aimé mon premier congé de maternité. Être toujours disponible pour mon enfant, avoir un oeil sur tout ce qu'elle ingérait, m'assurer du sommeil dont elle bénéficiait.

Avoir du temps pour aller aux nombreux rendez-vous et cuisiner de bons plats santé, savoureux et variés. Chantonner tout en travaillant, flâner dans le fauteuil berçant après la tétée.

Mais un emploi dont je rêvais depuis longtemps m'était offert sur un plateau d'argent. Et j'ai décidé que ma fille n'aurait pas d'une maman comme celle que j'avais eu la chance d'avoir, toujours présente.

Je n'ai pas regretté mon choix, bien que je me sois rendue au travail en larmes pendant plusieurs jours, jusqu'à ce que la nouvelle routine convienne à tout le monde.

Pendant mes journées de boulot, j'avais ces soudaines prises de conscience qui me donnaient de bizarres de sensations dans le ventre. Je ne sais pas ce que ma fille fait en ce moment. Quelqu'un, qui n'est ni son père, ni sa mère, est en charge de sa survie. Gloup!

Puis récemment, j'ai parlé de tout ça avec ma mère. Elle m'a aidé à relativiser sur sa propre situation de maman à la maison. Certains jours, ce n'était guère la fête et elle nous aurait bien vendus à rabais au marché. Les tâches ménagères si répétitives qu'elle effectuait en fredonnant doucement, elle les trouvait, elle aussi, bien aliénantes.

Quand j'entends ma fille me poser en boucle la même question, malgré que je lui serve chaque fois la même réponse, je me revois bombarder ma mère de mes babillages sans doute aussi assourdissants. Avec mes yeux d'enfant, je ne la voyais tout simplement pas soupirer d'ennui, ma maman. Tout comme ma puce n'a pas l'air de se rendre compte que j'ai souvent envie de trouver le bouton mute qui me permettrait deux ou trois minutes d'un silence salvateur.

Les mamans de la génération de la mienne, elles nous trouvent chanceuses de pouvoir choisir entre la carrière et la maison. Il m'arrive de me lamenter avec la conciliation travail/famille, mais diable, comme j'apprécie d'avoir au bout des cinquante semaines de maternité intensive, une alternative.

Mamans à la maison, en toute connaissance de cause, je vous admire et je vous comprends à la fois. Je vous envie, je vous plains parfois.

Je suis certaine d'une chose, vos enfants vous en seront éternellement reconnaissants. Je parle par expérience.

jeudi 12 mai 2011

De la place pour Petit Frère

J'ai toujours un petit pincement au coeur en envoyant Babou à la garderie, le matin. C'est que je suis en congé de maternité, donc disponible pour elle.

Elle n'y va pas chaque jour. En fait, je l'envoie en général 3 ou 4 fois par semaine. Parfois 5 aussi! Pourquoi?

Parce que je paye sa place de toute façon? Oui, il y a un peu de ça.

Parce que je veux qu'elle socialise? Qu'elle apprenne le partage, l'attente, la résolution de conflit ailleurs que sous mon aile? Oui, bien entendu.

Parce que je veux qu'elle apprenne par l'exemple de ses pairs? Certes, mille fois oui. Car c'est au contact de ses amis de garderie que Babou a appris (tout dernièrement) à boire au « verre de grande personne » et à remonter ses pantalons toute seule. J'applaudis cet encouragement à l'autonomie dont font preuve quotidiennement les éducateurs de ma puce.

Parce que je souhaite qu'elle se forge un système immunitaire béton? Bah, non. Je ne crois pas que ma fille doive attraper 12 rhumes et 6 gastro par année pour être pétante de santé plus tard. À mon avis, moins on est malade, moins on est malade. Et moins Babou est malade, moins le sommes-nous par ricochet!

En vérité, si Babou continue de fréquenter régulièrement son service de garde en milieu familial, c'est pour laisser un peu de place à Petit Frère.

À ma plus grande surprise, quand je suis seule avec mes deux oisillons, ma grande m'accapare davantage que mon poupon. Passé les premières semaines de vie de Petit Frère, durant lesquelles j'allaitais une heure sur deux et passais la moitié de mes jours et de mes nuits à le réconforter pendant ses coliques, c'est Babou qui a pris le plancher.

« Maman! Lire un beau livre! » « Encore une histoire, maman! » « Maman, jouer dehors avec mon râteau et ma pelle-toute-petite! Non! Pas rentrer tout de suite!» « Maman, regarder un beau passe-partout avec des amandes et un verre d'eau! » « Maman, j'ai envie de pipi! »
« Maman, je veux dessiner avec mes crayons de Tatie-Marraine! »

Tel est l'humble aperçu d'une demie journée dans la vie de Babou.

Petit Frère dans tout ça? C'est le bon diable qui flotte doucement dans le sillon du cyclone Babou. Le bon public qui entend à rire, les yeux écarquillés d'émerveillement devant les pirouettes et comptines de la petite coquine. La bonne pâte qui patiente pendant que l'autre fait courir maman à gauche et à droite. Toujours prêt à céder sa place pour les priorités numéro 1 de Madame Chose.

Quand même, je sais quand la remettre à sa place, ma petite grimace. Si je ne m'objectais jamais devant les mille et une commandes de Babou, mon fils passerait toujours bon dernier, le pauvre! C'est pourquoi je répète si souvent à ma fille « Chacun son tour, les amis! » ou encore « Pas tout de suite, maman est occupée! »

Pour toutes ces raisons, oui, j'envoie et j'enverrai encore Babou à la garderie pendant mon congé de maternité, ne serait-ce que pour que ce petit ait au moins la moitié de l'attention dont sa grande soeur a bénéficié depuis le jour béni de sa naissance.

Il le mérite bien, mon poussin.

lundi 9 mai 2011

Laissons-les donc nous surprendre!

Bien souvent, quand je leur en donne la chance, mes enfants me surprennent tellement!

C'est mon amie Geneviève qui me l'a fait réaliser, un peu avant que Babou fasse le grand saut vers son lit de grande fille.

J'étais enceinte de Petit Frère. Babou avait ses 18 mois bien avancés et je confiais à mon amie que je ne savais pas trop quand, ni comment faire changer et de chambre, et de lit à ma si petite grande fille.

« Fais-lui donc confiance, elle va t'impressionner, comme elle le fait tout le temps ».

Comme cette nuit de novembre 2009 où j'ai décidé de ne plus me lever trois fois par nuit pour allaiter ma puce de presque 9 mois. J'en avais assez fait, n'est-ce pas? « Fais ce que tu veux ma puce, moi, je dors!» Elle a pleuré 40 minutes. Dès le lendemain, elle a dormi 12 heures en ligne. Scénario qui se répéta jour après jour jusqu'à aujourd'hui, à quelques rares exceptions près.

Comme cette autre fois où, à 15 mois et 29 jours, Babou s'est levée debout au chalet de ses grand-parents et y a fait ses premiers pas. Solide, pleine d'assurance. Oui, elle a marché un peu plus tard que la plupart de ses petits amis, mais quand elle a été prête, c'était pour de bon et sans jamais trébucher.

Ce fut aussi le cas pour le transfert dans le lit/chambre de grande fille. Un beau dodo et de belles siestes dès le commencement. Elle sentait qu'il n'y avait pas d'autre issue, et surtout, elle était prête.

Depuis quatre jours, notre jolie coquine se balade en bobettes. Aucun dégât n'a été enregistré. En somme, il lui a fallu une première fin de semaine à apprendre à se retenir (et où j'ai épongé quelques échappées). Puis, une semaine d'adaptation couche/bobettes, avec visites sur le pot à la garderie. Puis du jour au lendemain, elle nous a clairement signifié - à temps - ses besoins.

M-E-R-V-E-I-L-L-E-U-X.

Quand, avec mes enfants, je redoute de franchir une étape, je repense toujours à mon amie Geneviève. À sa Filou qui n'a jamais rien voulu savoir des petites roues sur le vélo et qui, à 8 ans, est partie pour de bon avec sa petite bicyclette, sans rien ni personne pour l'aider. Elle avait pris le temps d'observer et de se sentir d'attaque avant de prendre le large.

Les observer, puis leur faire confiance. Sans pression aucune. Les laisser aller.

Avec mes petits, la recette fonctionne toujours.

Inspirant tout ça.

mercredi 20 avril 2011

De l'aide de l'au-delà

Depuis qu'elle nous a quittés, je lui ai parlé souvent, demandé de l'aide même, à ma grand-mère.

Je suis comme ça moi, je m'adresse à mes grands-parents décédés, à ces personnes sages qui, j'en suis convaincue, continuent de veiller sur ceux qu'ils ont aimé durant leur séjour terrestre. Je ne peux tout simplement pas m'imaginer que mes grand-mères et grand-pères finissent leur jour dans un cercueil et que rien d'autre ne les attend. Chacun ses convictions, ainsi sont les miennes. J'y trouve un réconfort qui m'est indispensable, et ce, surtout depuis que je suis maman.

Le jour des funérailles de grand-maman Marie-Jeanne, j'avais les nerfs en boule. Je devais préparer les bagages des enfants, les habiller, les coiffer, idem pour moi. Une poule pas de tête jonglant entre couches et fer plat.

L'Homme, de son côté, avait un peu plus tôt repassé sa chemise. Malgré les nombreux avertissements que je lui avais servi, comme chaque fois qu'il sort le fer et la planche à repasser, il avait laissé en plan ces deux objets, en ayant toutefois pris soin de fermer le fer à repasser.

Nous avons soudain entendu un hurlement, provenant de la chambre de Babou, où était justement installé le nécessaire à repassage. Aussitôt accourus dans la chambre, nous avons aperçu avec effroi le fer qui pendait au bout de son fil, la petite tout en cris et en larmes.

Je me suis imaginée le pire, ma fille brûlée vive ou pis encore, assommée par le fer brûlant.

Erreur. Elle pleurait seulement parce que l'eau du fer, qui avait fort heureusement eu le temps de refroidir, avait tout mouillé sa petite blouse. Pas une éraflure, pas une ecchymose, rien. Que du tissu mouillé.

C'est dans ces moments là que je me plais à penser qu'un ange - Grand-Maman peut-être? - veillait sur Babou à ce moment précis.

Plus tard, durant la cérémonie, le prêtre qui est aussi le neveu de ma grand-mère, nous a justement encouragé, nous, la grande famille endeuillée, à continuer de nous adresser à notre si chère disparue. Qu'elle nous entendrait, d'où qu'elle soit.

Elle veille sur nous, la Marie-Jeanne. Pas de doute.

mardi 19 avril 2011

Convertir les pertes en privilèges

Si on lui demandait quels sont les avantages actuels d'avoir un petit frère, Babou n'aurait pas grand chose à dire.

Avant même que j'accouche de mon merveilleux fils, une amie qui venait d'accueillir son deuxième enfant me racontait avoir lu quelque part que pour un aîné, l'arrivée d'un petit frère ou d'une petite soeur n'apporte que des pertes -- pour les premiers temps du moins.

Perte de l'exclusivité parentale, de jouets ou objets qui appartiennent désormais au bébé. Perte de toute l'attention que les visiteurs nous portaient depuis la naissance.

Nous avons pu l'observer avec notre petit sujet qui avait 20 mois et demi à l'arrivée de Petit Frère. Elle n'a pas trouvé drôle la première fois où on a installé notre nouveau-né dans SON porte-babou. Même histoire avec le siège vibrant, la balançoire, la sauteuse, le siège Bumbo, les biberons, la suce, les jouets de dentition et même les couches! Si elle avait pu, Babou aurait volontiers porté les formats 1-2 de Petit Frère pour bénéficier des mêmes privilèges que lui.

On apprend à gérer ces petits deuils, qui se traduisent en débordements de possessivité, en crises de jalousie, en grosses larmes sincères nées de la difficile notion de partage.

Puis Babou a eu deux ans. Dans ma tête, c'est l'âge où on accède peu à peu à l'enfance en laissant le petit bébé derrière soi. Je le vois bien que les jambes de ma poulette ont tellement allongé en quelques mois! Que ses petites rondeurs de bébé l'ont quittée presque partout, sauf dans les joues!

J'entends très bien ses phrases complètes qui me scient parfois les jambes, autant que j'applaudis ses initiatives de rangement de jouets, d'aide au moment de mettre la table et de réconfort de Petit Frère quand je suis occupée ailleurs pendant quelques secondes.

Elle grandit, ma toute belle, et ça me donne le goût de lui faire apprécier - et non plus craindre - cet inévitable phénomène.

Hier, Babou a, comme tous les matins depuis que je ne l'allaite plus, bu son biberon matinal dans son lit. Quand j'ai découvert qu'elle l'avait dévissé alors qu'il était encore bien plein, et que j'ai par la suite dû faire trois brassées de lavage pour venir à bout de ce dégât, j'ai décrété haut et fort : FINI le biberon!

J'avais toujours fait fi des recommandations d'enlever le biberon matinal à 12 mois. C'était le seul qu'elle buvait de toute façon, elle qui n'a jamais eu de suce ni de pouce à téter (allez me faire croire que ses dents seront désenlignées avec une tétine dans la bouche 5 minutes par jour...).

Ma fille aimait le rituel et nous, appréciions qu'elle relaxe en buvant son lait au lit pendant quelques minutes, dès son réveil. Et il n'y aurait pas eu de pire momentum que de le lui enlever au même moment que Petit Frère débarquait dans nos vies.

L'épisode d'hier fut la (les) goutte qui a fait déborder le vase. Je lui ai expliqué, alors qu'elle hurlait de désespoir en voyant son dernier biberon aboutir à demi-vide dans l'évier, qu'elle perdait effectivement son biberon. Mais que j'irais le jour même lui chercher un verre de GRANDE SOEUR à la pharmacie. Un truc de princesses, tout rose, la totale pour une fillette quoi!

Ses grands yeux se sont allumés. J'ai senti que la notion de privilège était maintenant à sa portée, et que nous devrions désormais user de cette stratégie pour l'aider à grandir.

Non pas que je veuille pousser ma toute-petite en bas du nid. Mais plutôt lui faire miroiter les avantages d'accéder à de nouvelles étapes.

Depuis une semaine, elle revient de la garderie en marchant près de moi et de la poussette où roupille Petit Frère. Elle adore courir, sauter dans les flaques d'eau, prendre le temps d'observer ses points de repère.

Prochain objectif, l'introduire doucement vers la propreté. Je soupçonne Babou d'être pleinement consciente de ses sphincters, mais de vouloir conserver encore précieusement les changements de couches, moments où elle bénéficie de toute notre attention.

Petit coeur, va. Lentement mais sûrement, je le sens, les pertes deviendront pour elle des privilèges. Simple question de perspective!

lundi 18 avril 2011

Ces rencontres qui marquent

J'ai toujours été fascinée par ces rencontres de gens avec qui la connexion se fait instantanément. Je vous ai même déjà raconté celle-ci, si chère à mon coeur.

Suis-je particulièrement choyée par la vie? Est-ce le fait d'habiter une ville d'une dimension permettant ce genre d'heureux événements? Je n'en sais rien.

Dimanche, fin d'après-midi, au parc du quartier. Nous arrivons avec nos deux poussettes et leurs occupants, l'Homme et moi, pour permettre à Babou de se dégourdir les jambes. Au même moment arrive une maman et sa jeune demoiselle.

Nos deux coccinelles se balancent côte-à-côte et j'entame la conversation. Je m'intéresse toujours sincèrement aux enfants des autres, il faut dire. Elle a deux ans, la choupette, et porte une partie du prénom de ma fille. En creusant, j'apprends qu'elle est née sept jours après Babou, la même année. Avec la même équipe de médecins qui m'a suivie à ma première grossesse.

La conversation continue. La petite A. qui se balance près de Babou a également un petit frère, qui a très failli porter une partie du prénom de mon fils. Et qui est né sept jours après lui, la même année.

Ce pattern familial similaire nous fait sourire, nous étonne même, toutes les deux. Au fil de la conversation, qui se poursuit avec enthousiasme, nous découvrons habiter le même quartier pour les mêmes raisons : commerces de proximité, jolis parcs, circuits de poussette multiples et agréables.

Toutes les deux, nous le découvrons en discutant, avons vécu des accouchements naturels heureux et sans histoire et vivons toujours de beaux allaitements. Qu'il est bon de converser quand les valeurs sont sensiblement les mêmes! Qu'il est rafraîchissant de se sentir comprise sans avoir eu le temps de terminer une phrase!

Comme si ce n'était pas encore assez, la maman de A. a découvert en nous parlant qu'elle travaille exactement dans le même domaine que mon Homme, les terrains contaminés. Et qu'elle fait régulièrement affaire avec ses collègues. Décidément, nos routes se croisent à de multiples reprises.

Cependant, nous apprenons aussi que cette gentille petite famille changera très bientôt de quartier. Ça nous désole un peu, nous y voyions réciproquement un fort potentiel de voisinage familial. Qui n'est certes pas exclu, seulement un peu moins à portée de main.

L'avenir saura nous dire si nos chemins se croiseront à nouveau!

jeudi 7 avril 2011

Une porte, tout doucement, s'est refermée

Ma grand-mère vient de faire son dernier voyage, celui dont on ne revient pas. À l'âge de 94 ans, notre belle Marie-Jeanne s'est tout paisiblement laissée aller au repos le plus mérité qui soit. Après une vie belle, laborieuse, éreintante, pétillante, remplie de besognes et d'enfants, de saisons qui passent, de proches qui partent et qui ne reviennent pas, de temps des sucres, de potagers luxuriants qui faisaient toute sa fierté, de naissances, de désespoir, de bon pain maison, d'émerveillement et de visiteurs du dimanche après-midi.

Elle était si particulière, ma grand-mère! Elle possédait une fougue de tous les diables doublée d'une foi à déplacer les montagnes. Avec elle, c'était noir-noir ou blanc-blanc, jamais de zone grise. Et quand elle aimait, c'était de tout son coeur, de tout son être, à s'en réveiller la nuit, et ce, pour toujours. Tout en émotion qu'elle était, ma grand-maman!

Notre Marie-Jeanne, elle ne mâchait pas ses mots. Son franc-parler légendaire, elle savait le manier d'une façon si déconcertante, à nous faire tous mourir de rire au moment où l'on s'en attendait le moins. Cette ferveur qui l'animait la faisait aussi nous embrasser, que dis-je, nous étreindre si vigoureusement qu'enfants, nous en perdions parfois le souffle et en étions même venus à redouter un peu ses décoiffantes effusions à la limite de la bousculade!

La spontanéité et l'entièreté étaient ses marques de commerce. N'était pas une girouette ni une cachottière, ma mère-grand, toujours fidèle à elle-même et à ceux qui l'aimaient, toujours priant pour sa ribambelle d'enfants et de petits-enfants et sa multitude d'arrière-petits-enfants. Il fallait qu'il soit grand, son coeur, pour en loger autant.

Enfant, c'était un privilège pour moi d'aller la visiter, d'aller me bercer avec elle dans le solarium, en lui tenant la main, pour ensuite aller sauter sur les lits avec mes cousines, en haut de la maison qu'elle a habité toute sa vie, depuis son mariage jusqu'à il y moins de deux ans. Adolescente, je feuilletais avec intérêt ses vieux albums photos remplis de souvenirs en noir et blanc.

Devenue adulte, je lui ai présenté avec empressement mon ventre arrondi. Elle m'a dit, ce jour-là, qu'elle me trouvait belle. Que, comme ma mère, je semblais bien porter les enfants. Ça m'avait fait tout chaud au coeur, un si beau compliment venant d'elle qui avait couvé puis élevé onze petiots. Onze!

C'est aussi avec la même hâte que je suis allée lui présenter son arrière-petite-fille, la vingt-deuxième je crois. En allaitant mon bébé dans la chaise berçante de ma grand-mère, j'ai écouté celle-ci me raconter qu'elle avait aussi nourri de son lait tous ses enfants. En me voyant procéder, elle se revoyait plusieurs décennies plus tôt avec ses propres mousses au sein. Un tel échange entre ma grand-mère et moi constitue -- et Dieu merci j'en étais alors consciente -- un moment privilégié, un cadeau intergénérationnel inattendu, inespéré et d'une valeur inestimable.

Il y a deux mois, par un beau dimanche après-midi, mon homme me proposa d'aller visiter Grand-maman pour lui présenter notre fils, alors âgé de deux mois. Ce jour-là, j'étais consumée de fatigue et je l'avoue, j'ai hésité un quart de seconde : la visite dominicale ou la sieste? Quelque chose me poussa toutefois à aller faire les grandes présentations.

Elle nous reçut à bras ouverts, Marie-Jeanne, dans la petite chambrette du foyer qu'elle occupait depuis à peine deux ans. Comme prévu, elle entra en pâmoison devant fiston, l'inonda de bisous, de câlins et de compliments, l'idolâtra, le cajola et quand il fut pour nous le temps de partir, nous supplia de le lui laisser, à la blague, pour néanmoins nous prouver à quel point son amour pour le si-petit dépassait l'entendement.

Avant de nous accueillir cet après-midi là, nous l'apprendrions plus tard, Grand-maman se sentait fatiguée, lasse, sans énergie. Or ce n'est pas du tout dans cet état que nous l'avions trouvée : quand elle avait de la visite, et surtout, quand on lui présentait un nouvel arrière-petit-enfant, fini les petites misères, c'est comme si Marie-Jeanne s'était abreuvée à la fontaine de Jouvence!

C'est cette image d'elle que je veux garder bien vivante à ma mémoire. Une photo mentale toute en couleurs d'une grand-maman transie d'amour pour sa descendance. Une grand-mère qui, si elle l'avait pu, aurait vécu deux cent ans de plus pour pouvoir continuer de prier pour nous, les nombreux amours de sa longue vie.

D'où qu'elle soit, Grand-maman veille au grain, ça, je n'en ai pas le moindre doute.

Repose en paix, maintenant, ma belle grand-maman. De te savoir entre bonnes mains apaise mon chagrin...

lundi 4 avril 2011

Le regard d'un fils, un charme qui opère

Je ne sais pas si c'est le fruit de mon imagination, mais j'ai vraiment l'impression que le regard que pose sur moi mon fils est différent de celui de ma fille, au même âge du moins.

Parler de complexe d'Oedipe à propos d'un bébé de quatre mois et des poussières me semble un tantinet tiré par les cheveux et pourtant, quel séducteur il fait, ce Petit Frère.

Dans une foule, il me cherche du regard et quand il m'aperçoit, à l'autre bout de la pièce, c'est le soleil qui se lève sur le far west tant un sourire illumine son visage.

Il maîtrise à la perfection toutes les petites moues coquines à croquer pour faire de mon coeur de mère un océan de caramel fondu. Et c'est unanime, tous ceux qui le voient me faire de l'oeil s'entendent pour dire que Petit Frère semble vénérer sa maman.

C'est ce que je trouve merveilleux dans le fait d'être maman d'une fille et d'un garçon, voir le lien entre eux et moi se tisser différemment, au gré de leurs personnalités différentes, soit, mais aussi de leur identité sexuelle.

Dans les yeux de ma fille, il y a toujours ce petit "je-veux-faire-comme-maman" complice, admiratif et absolument adorable. Envers elle, je me sens comme un modèle, le tout sans prétention, simplement pour dire que je ressens que j'ai un devoir de lui enseigner certains principes de la vie de petite fille!

Dans ceux de mon fils, il y a davantage de "maman-tu-es-le-centre-de-mon-univers-et-j'irais-au-bout-du-monde-avec-toi". Il n'a rien à faire de mes enseignements, il a juste besoin que je sois là pour lui, échevelée, en pyjama, à moitié morte de fatigue, peu lui importe. Ma présence, même fantomatique, le comble.

Deux enfants, deux regards, une même intensité qui me font sentir tellement riche.

mardi 15 mars 2011

Histoire de prénom - la suite

Bien avant sa naissance, nous avions décidé que Bb2 porterait, s'il était un garçon, le prénom masculin que nous n'avions évidemment pas utilisé pour Babou.

É., qu'il s'appellerait. Notre amour pour ce prénom ne s'était pas affadi malgré les deux ans qui s'étaient écoulés depuis mon premier test de grossesse positif.

À l'approche de la naissance de Bb2, j'ai eu une conversation, un soir, avec ma belle-soeur, concernant notre choix de prénom. Elle avait soulevé le fait que É. était devenu assez commun, et que ça la surprenait qu'on nomme ainsi notre enfant, nous qui avions trouvé un prénom beaucoup moins fréquent pour notre belle Babou.

Peu après avoir raccroché, je suis allée me coucher.

Dans la nuit, j'ai fait un rêve/songe. En fait, aucune image dans ce rêve, mais plutôt une voix qui me suggérait le futur prénom de mon fils. Qui ajoutait un prénom à ce É. que nous aimions depuis si longtemps.

Un rêve sur fond noir, une voix off, un prénom que je n'avais jamais entendu mais qui sonnait très bien à mes oreilles : P.-É. Doux, musical, original mais pas inventé. Au petit matin, j'ai raconté cet étrange phénomène à l'Homme, qui a lui aussi aimé cette suggestion venue d'on-ne-sait-où.

Quand notre fils est né, nous avons hésité un quart de secondes entre É. et P.-É., puis nous avons opté pour le nom composé, qui de surcroît s'harmonisait avec le prénom de Babou. Mes enfants portent le nom de famille de leur père, très court, ce qui convient particulièrement bien aux prénoms composés.

Le lendemain de la naissance de notre petit garçon, Beau-Papa est venu nous visiter. Il nous a entre autres raconté, en tenant dans ses bras son premier petit-fils, qu'il avait eu une migraine la veille, malaise qu'il n'avait jamais eu auparavant. Est-ce une pure coïncidence, la durée de sa migraine correspondait à celle de mon accouchement, décalée d'une heure cependant.

Tout en regardant avec fierté et émotion son petit-fils, Beau-Papa nous a ensuite remercié de lui avoir donné le prénom P., celui-là même du grand-père de son père. Il pensait que nous connaissions ce détail généalogique et que nous lui avions donné ce prénom en guise de clin d'oeil pour la poursuite de la lignée.

Il fut donc bien surpris d'apprendre que ce prénom nous était arrivée par la voix des rêves, et nous, particulièrement touchés qu'une partie du prénom de notre fils soit celui de son aïeul.

Hier, nous avons fait baptiser notre adorable fils, qui est, pour le moment du moins, le seul à pouvoir transmettre le nom de famille paternel, la continuité de la lignée reposant entièrement sur les épaules de mon conjoint.

Bien que ce détail semble futile pour certains, il comptait beaucoup pour Beau-Papa, qui a profité de l'événement pour remettre à son fils la bague du Grand-Père, comme il le lui avait un jour promis avant que nous ayons nos enfants.

C'était fort sympa, ce petit rituel. Un jour, l'Homme pourra le refaire avec notre petit garçon devenu grand, qui tiendra peut-être aussi son propre fils dans les mains.

lundi 14 mars 2011

Une mise à jour s'impose

DU SOMMEIL...
Petit Frère vient tout juste d'avoir quatre mois. C'est un bébé calme, souriant et serein, un rayon de soleil quoi!

Pourtant, chaque jour, j'apprends à ses côtés à être une meilleure maman. C'est que mon petit bonhomme ne l'a pas facile au point de vue de la digestion. Ses deux premiers mois de vie n'ont été que pleurs de détresse, siestes entrecoupées de douleurs, nuits ponctuées de réveils, de cris et de tortillements.

Deux mois durant, il a dormi pratiquement toutes ses nuits couché sur mon ventre, en tétant mon petit doigt pour se réconforter (la suce n'était pas encore devenue son amie). Je me doutais bien que quelque chose dans mon alimentation lui causait toutes ces souffrances, tant et si bien que j'ai arrêté du jour au lendemain de consommer tout ce qui s'appelle produits laitiers, bovins, caprins et de soya.

C'est là qu'a enfin pu se faire la rencontre avec le petit trésor tel que décrit à la première phrase de ce billet.

Aux prises avec tous ces inconforts, Petit Frère bénéficiait d'emblée du cododo, le sommeil avec maman étant à mon avis la meilleure façon d'économiser l'énergie de toute la famille. Mais passées les nuits de coliques, je ne voyais quand même pas mon sommeil, ni le sien, s'améliorer.

Mon erreur aura été de penser que Petit Frère dormirait avec moi aussi bien que Babou le faisait au même âge. Cette petite buvait aux trois heures la nuit, et entre les boires, un petit loir. Nous dormions d'un sommeil profond, bien collées elle et moi, et bien qu'entrecoupées par de courts réveils, mes nuits étaient totalement réparatrices et je me levais chaque matin fraîche comme une rose.

Pas avec Petit Frère. Même sans avoir de coliques, mon petit garçon s'agite beaucoup durant la nuit, se tortille, tétouille quelques minutes, regimbe, chigne et gigote. De telle sorte que jusqu'à il y a environ deux semaines, je pouvais me réveiller entre 5 et 50 fois durant la même nuit. Une véritable aberration dont mes cernes peuvent encore témoigner.

Puis une nuit, n'y tenant plus de voir le petit tourbillon m'empêcher de plonger dans un sommeil enfin réparateur, je suis littéralement allée le larguer dans son lit. Débrouille-toi tout seul si tu n'es pas content!

Il a dormi trois heures d'une traite.

Mon fils aime dormir seul dans son lit! Tout le contraire de sa grande soeur qui y voyait là une trahison, un abandon parental que j'ai mis des mois et des mois à faire disparaître.

Mon petit coeur, tu fais de moi une meilleure maman. Tu m'enseignes en étant toi-même que tu as à vivre ta propre histoire, et ce, quoi que je fasse. Merci d'élargir mes horizons, petit garçon!

DE L'ALIMENTATION...
Les coliques et diverses douleurs digestives de Petit Frère sont en grande partie derrière nous... du moment où je ne commets aucune incartade alimentaire.

De temps à autres, je me risque à manger un microgramme de fromage et quelques heures plus tard, à mon grand désespoir, Petit Frère redevient le petit bébé torturé que j'ai côtoyé deux mois durant. Même rengaine avec le poivron rouge, qu'il ne supporte pas dutout.

Certes, mon alimentation manque d'un peu de soleil. Les pâtes et la pizza sont, sans fromage, d'un tel ennui!

J'avoue toutefois prendre quand même un réel plaisir à me creuser les méninges pour réussir des recettes en substituant les produits laitiers. Avec les boissons de riz et d'amandes et le lait de coco, je parviens à de très bons résultats! La viande de boeuf ne me manque pas tellement, puisque de nombreuses autres viandes sont à ma portée (cheval, poulet, canard, porc, lapin, sans compter les poissons).

Ceci dit, après deux mois de "sacrifice alimentaire", je crois en l'importance d'allaiter mon fils. Babou et son papa me supportent également très bien dans l'aventure, et mangent généralement la même chose que moi.

J'ai tout le reste de ma vie pour saupoudrer du parmesan sur mes fetuccinis, n'est-ce pas?


DE LA FRATERNITÉ
Babou semble apprécier de plus en plus Petit Frère. J'ai assisté dernièrement à des échanges de petits regards complices, à des sourires, et même, à des guilis guilis! L'apprivoisement se fait lentement, pas de façon constante, ponctuée de petits réflexes de possessivité de Babou, de petits deuils (non, pas mettre Petit Frère dans MA balançoire!).

Malgré ces légers, si légers accrocs, j'entrevois des jours heureux entre mes deux enfants qui très bientôt s'amuseront ensemble, regarderont Passe-Partout lovés un contre l'autre sous la même doudou et partageront leurs collations.

Aussi, il faut voir les grands yeux admiratifs de Petit Frère suivre sa grande soeur dans toutes ses aventures. Un spectacle tellement attendrissant!

À la lumière de chacun de ces constats, je me demande, à l'occasion, quelle personne je pourrais bien être devenue si je n'avais pas à mes côtés ces petits êtres aussi exigeants qu'énergisants.

Je serais mieux habillée, mieux coiffée. J'aurais plus de temps à accorder à mes amitiés et je connaîtrais certainement beaucoup mieux les dernières sorties cinématographiques ainsi que les meilleurs 5 à 7 en ville.

N'empêche...

Mes enfants, mon oxygène. Vous m'amenez ailleurs, mes amours, et ça n'a pas de prix.

vendredi 18 février 2011

Le récit de ta naissance

Mon trésor,

Il y aura bientôt trois mois que tu es parmi nous. Déjà! C'est à peine si je me souviens ce qu'était mon quotidien sans tes beaux yeux clairs et tes petits airs coquins.

Depuis le jour 1 de ta vie, je pense à ce récit, celui de ton arrivée si parfaite dans notre univers, dans notre famille. Et les jours et les nuits passent, et la vie qui n'arrête pas... Toutes les raisons sont bonnes pour faire passer les obligations ménagères avant la rédaction de ton histoire. C'est la réalité de bien des mamans, mon garçon!

Il faisait soleil, le 25 novembre dernier, mon bonhomme. Dès ma première contraction, qui m'a tirée du sommeil à 3 h 45 du matin, je savais que tu arriverais ce jour là. J'étais prête à t'accueillir, il faisait beau, ta grande soeur passerait la journée à la garderie et dormirait chez Tatie, le congélo était plein. « Viens t'en bébé! »

Il faut dire que j'avais eu une fausse alerte une semaine et demi plus tôt, en pleine nuit. Des contractions assez régulières et douloureuses pour que j'aille me couler un bain, mais comme des dizaines de petits détails techniques restaient à régler pour permettre l'accouchement à la maison que je désirais, je t'avais supplié d'attendre encore un peu, au chaud dans mon ventre. Ce que tu avais fait, gentil petit coeur. Les contractions avaient cessé et le lendemain, ton papa a piqué un sprint pour accomplir la liste de choses à faire pour ton arrivée chez-nous.

Dans la matinée du 25 novembre, mes contractions étaient très irrégulières, et très très supportables. Tellement que ton père est parti travailler -- il devait se rendre sur le terrain pour terminer un dossier important. Je l'ai laissé partir en ne sachant pas trop si tu te pointerais rapidement ou pas, mais en lui faisant promettre de s'asseoir sur son téléphone cellulaire : )

J'ai eu un petit pincement au coeur en voyant partir ta grande soeur, si petite encore, à la garderie. Mon bébé, tu devras maintenant être mon aînée!

À 8 h 30 le matin, j'ai appelé M., ma deuxième sage-femme car É., la première, n'y était exceptionnellement pas. Étrange, mais depuis quelques temps, je sentais que j'accoucherais en présence de M. Je lui ai dit ne pas trop savoir où j'en étais avec l'évolution de mon travail.

Moins d'une heure plus tard, elle vérifiait mon col et m'annonçait que tu serais parmi nous bientôt, dilatée que j'étais à 4 cm, membranes bien bombées. Encore à ce stade, peu de contractions, et une douleur plutôt soutenable. Tellement que M. m'a proposé de me quitter et d'attendre mon appel. Elle tenait par contre à ce que la stagiaire M.-É. soit arrivée chez nous pour me laisser entre bonnes mains.

J'appelle ton papa et lui dit de ne pas tarder à revenir à la maison. J'appelle Ge, notre bonne fée, qui s'occupera de la logistique -bouffe-café-débarbouillettes-lavage pendant l'accouchement à domicile.

Finalement, M. n'est jamais repartie. 45 minutes après l'examen du col -- le seul que j'aurai de toute la durée de l'accouchement, à ma demande -- une véritable douleur me foudroie. Le visage me change drastiquement, je respire profondément, les yeux fermés. M. ne partira pas, il n'en est pas question! Il est 10 h, début du travail actif.

Les contractions s'enchaînent à un bon rythme. Je les prends toute seule, assise sur le ballon, dans ma salle à manger que le soleil inonde. M. prépare son matériel d'accouchement.

Je commence à trouver la douleur difficile à supporter. Ton père arrive au moment où je commence à douter de ma capacité à supporter la prochaine contraction. Il est survolté, il a couru dans les corridors de son bureau et a adopté la conduite "cowboy" tellement il sentait la soupe chaude.

M.-É. et Ge arrivent presque en même temps, vers 10 h 45. Les deux sont assez surprises de me voir déjà dans ma bulle, à respirer, à faire des sons pour passer les contractions. Oui mesdames, le travail avance vite. Je ne m'en plains pas!

M. se berce tranquillement en lisant le journal, dans un rayon de soleil, nous lance un ou deux conseils à l'occasion, remplit calmement de la documentation. Sa présence est respectueuse et discrète, elle sait ce que je suis capable d'accomplir sans son intervention. J'apprécie.

Ton papa débute les massages, aidé de M.-É. Quand ta soeur est née, ce type de points de pression m'avaient tellement aidée! Mais là, je n'arrive pas à trouver de position, tout m'est insupportable. Je change constamment d'appui, je bouge, je me tortille. Ciel, faites que cet accouchement ne dure pas trop longtemps, c'est si intense!

M. me dit que la pression que je ressens dans le bas de mon ventre, ce sont mes membranes qui ne veulent pas se rompre. « Tu es capable de les faire se rompre par elles-mêmes, nous n'interviendrons pas, concentre toi là-dessus!» C'est ce que je fais et quelques temps après, je me rends aux toilettes pour ce que je pense être un pipi et bang! Comme un ballon qu'on crève, je perds mes eaux! Ton père et moi sommes si contents du bon timing, pas de dégâts! Je suis soulagée - momentanément - puisque la pression dans mon ventre vient de diminuer.

On m'a coulée un bain. J'y entre le temps d'une contraction, mais M.-É. me sort rapidement de là, je viens de commencer à pousser. Vite, dans la chambre! La distance séparant la salle de bain de la chambre est d'à peine 6 -7 mètres, je la traverse en arrêtant au moins trois fois pour des contractions olympiques.

La deuxième sage-femme, N., et la stagiaire Mi. arrivent quelque part à ce moment là. Je n'en ai à peu près pas conscience, elles sont si discrètes! Je sais toutefois que Mi. a pris des photos pour immortaliser ton arrivée.

On m'installe sur le lit pour la poussée, à genoux, soutenue par ton papa, puis par Ge. Je pousse de toutes mes forces en ayant l'impression que rien ne se produit. Je veux que ça finisse maintenant, je suis à bout! Tout est allé si vite et maintenant, pourquoi tu ne descends pas?

Je repense à la naissance de ta soeur, pour laquelle le travail a duré 13 heures, mais au moins la poussée fut expédiée en quelques minutes. Aurai-je la force de pousser pendant une heure, deux heures?

Sentant poindre le découragement, M. intervient en me conseillant de me relever une jambe, pour être semi-accroupie. C'est le déclic, bébé descend, je sens la brûlure si particulière à ce moment de l'accouchement. Je suis pendue au cou de Ge (tellement que j'en ai été courbaturée pendant des jours entiers). Je pousse tellement fort que je ne respire qu'aux 5 minutes, il me semble. Je n'émets aucun son.

Ton papa et les sages-femmes/stagiaires sont accroupis au pied du lit, prêts à t'accueillir.

Quelques poussées plus tard, voilà ta petite tête. C'est si étrange de te voir à mi-chemin entre le monde aquatique et terrestre. Nous te rencontrons sans connaître ton sexe tout de suite, c'est si particulier! Nous te caressons les cheveux, j'ai hâte que tout soit terminé.

Prochaine contraction, les épaules. M. t'aide à passer car ça coince un peu. Tu es né! La douleur n'est plus, c'est si bon de retrouver son corps indolore!!

« Un garçon! » Pas possible! Je ne suis pas particulièrement douée pour les « feelings » de grossesse, j'avais l'impression de porter une deuxième fille, alors que pour ta soeur, j'aurais mis ma main au feu que j'attendais un garçon. Me voilà maman comblée, une fille, un garçon. Je suis sous le choc, positivement parlant.

On m'aide à m'étendre pour l'expulsion du placenta. Et les tranchées, ces contractions qui aident l'utérus à reprendre sa dimension d'origine, me surprennent par leur intensité. Elles dureront plusieurs jours, malheureusement! J'ai mal, je tremble, j'ai froid, je suis épuisée, mais tu es là et déjà, tu t'agrippes à mon sein et veux téter vigoureusement. Tu seras, au sein, tout le contraire de ta grande soeur, qui avait mis des jours et des jours à développer ce réflexe inné.

Tu es collé sur moi, mon bonhomme. Mon ourson, mon petit coco d'amour. Bienvenue dans notre famille, bienvenue chez toi, dans ce lit, dans cette chambre, dans cette maison. Sur cette planète.

Accoucher chez soi, c'est prendre sa douche dans sa propre salle de bain une heure après avoir donné la vie. C'est souper avec ce qu'il reste dans le frigo, en tenant d'une main son nouveau-né et en débarbouillant le visage de sa puce de 20 mois et demi. C'est se bercer dans la salle à manger pendant que l'amie de la famille plie les draps et linges et débarbouillettes qu'elle vient de laver, pour que tout soit en ordre après l'arrivée de bébé.

Mais plus que tout, accoucher chez soi, c'est mettre au monde dans la plus pure simplicité.

Tu es né à 39 semaines et un jour, à 12 h 49, mon petit garçon de 8 lb et 1 once (je pouvais bien avoir ce ventre énooorme!). En moins de trois heures de travail, tu étais dans mes bras, ce qui nous a tous réjouis, moi en particulier.

Depuis, tu ne cesses de nous surprendre. Merci à toi, petit cadeau de la vie!

jeudi 20 janvier 2011

Une présence bienveillante

Je ne possède pas cette sensibilité qu'ont certains pour ressentir les âmes, pour voir les auras et pour ne pas se sentir seul, même dans une maison vide. Ça me va très bien ainsi.

Toutefois, je ne nie pas l'existence de ces visiteurs invisibles.

Quand nous avons mis les pieds pour la première fois dans la maison que nous habitons en ce moment, mon conjoint et moi nous nous sommes immédiatement sentis chez nous. C'était vide, vieillot, les couleurs des murs (décrépis) étaient moches, mais pour une raison obscure, on s'y plaisait à un point tel qu'on a acheté l'immeuble.

Avant d'y emménager, nous avons beaucoup parlé avec l'ancienne proprio. Elle habitait alors le logement du haut, et allait quitter quand nous prendrions possession du duplex. Le logement du bas était alors vide depuis plusieurs mois. Sa mère l'avait longtemps occupée. Mais était décédée durant l'année.

« Elle n'est pas morte dans la maison, je vous l'assure », nous avait dit la proprio.

Nous ne la croyions qu'à moitié.

Puis nous avons pris possession de notre première maison. Avant le déménagement, nous avons d'abord repeint les murs et apporté des réfections mineures aux lieux.

Nous n'avons jamais vu de fantôme, ni entendu de craquements hostiles, ni constaté de baisses de tensions inexpliquées dans l'éclairage.

Mais c'est trop étrange le nombre de fois où nous avons trouvé exactement ce dont nous avions besoin pour nos rénos dans ce que la proprio nous avait laissé, dans la cave ou dans le garage. Assez souvent pour qu'on le remarque et pour qu'on remercie la défunte dame âgée de prendre aussi soin de nous, nouveaux occupants qui ne voulions que du bien à son ancienne demeure terrestre.


Un jour, le voisin de gauche, en discutant avec mon homme, lui a affirmé que la dame était bel et bien décédée dans la maison.

...

Pas de craintes de dormir seule, pas d'angoisse. La vie continue, tout simplement. En compagnie d'une imperceptible présence bienveillante.


Puis, le 25 novembre dernier, mon fils est né dans cette même maison où, à en croire le voisin, une bonne âme se serait éteinte il y a quelques années.

Comme pour rééquilibrer les choses.

Je ne peux m'empêcher de trouver cela très doux, très romanesque. J'en ai des frissons.

mercredi 12 janvier 2011

C'est mon travail, c'est mon métier...

Je vis très différemment ce deuxième congé de maternité. Je suis certainement plus décontractée.

Avec Babou, il y a 22 mois, j'étais affolée à l'idée de penser que je venais de m'enfermer pour 18 ans dans la maison avec un petit être entièrement dépendant de sa mère. J'étais sérieusement convaincue que je ne dormirais plus trois heures en ligne pendant au moins un an, que j'allaiterais pendant une heure et demie à toutes les deux heures pour au moins six mois.

Quel choc, quand même, que ces premiers pas dans ma vie de maman. Pendant les toutes premières semaines de la vie de ma toute-belle, faire la vaisselle, récurer la cuvette, toute tâche normalement désagréable me paraissait une délivrance en comparaison à mon rôle plus ou moins habile d'allaitante-endormisseuse. J'étais si certaine d'être l'esclave de mon enfant pour l'éternité que je n'avais qu'un objectif : l'endormir et la déposer quelque part.

Vous aurez compris que ce fut exactement le contraire qui se produit. Ô misère que cette fillette avait du mal à sombrer dans un bon sommeil durable! Et évidemment, exit jusqu'à l'idée même de la déposer une fois endormie, j'en étais alors quitte pour tout recommencer mon épuisant stratagème d'endormissement du début, puisque miss Babou se réveillait presque à l'idée que sa maman la largue dans son lit! J'étais au bord du désespoir environ 12 fois par jour.

Heureusement, les mois passèrent, la routine s'installa et je compris à quelle vitesse affolante un congé de maternité se déroule.

Puis, enceinte de Petit Frère, je me suis prise à espérer un enfant plus facile à endormir, à déposer dans son lit. Je ne saurais dire si j'ai été exaucée. Maintenant que je l'ai dans les bras, ou dans le porte-bébé, je me surprends à voir les choses tout à fait différemment.

D'abord, il est certes plus facile à endormir. Mais il n'aime pas tellement non plus passer de l'enveloppante paire de bras parentale au matelas frisquet de son petit lit de bébé. Parfois il continue de dormir, parfois il me hurle de le reprendre à peine deux minutes après. Et ça me dérange tellement moins (voire pas du tout).

J'interromps tout autant mes tâches que quand ma mini Babou avait le même âge et me réclamait. Je passe autant de temps à promener Petit Frère dans la maison pour l'aider à passer ses désagréments gastriques. Mais je respire bien plus calmement quand il me hurle dans les bras que quand sa grande soeur avait elle aussi les blues du petit bedon.

Ma très chère amie Geneviève, qui a vu naître mes deux enfants et qui est aussi en ce moment en congé de maternité, me répète quelquefois cette affirmation tellement vraie, elle qui se lève la nuit pour allaiter sa petite merveille de six mois. "C'est mon travail, je suis payée pour ça".

Elle a tellement raison. C'est la définition même du congé de maternité : être payée pour voir grandir son enfant, dans ce que ce rôle a de plus gratifiant, ou de plus exigeant. Recevoir des sous pour assister à ses premiers sourires, pour l'aider à digérer, pour soigner un petit front poqué, pour introduire les aliments dans le bon ordre, pour frotter les petits cache-couches qui ont épongé un trop-plein.

Et comme pour le "vrai" boulot (celui pour lequel on déprime le dimanche soir et on jubile à partir du jeudi 17 h), il y a des moins bons jours que d'autres. Voilà tout.

À partir du moment où on prend une colique, une mauvaise nuit, une pénible journée à la fois, ciel que la vie à la maison avec bébé est plus douce.

Tout ça, j'aurais aimé qu'on me le dise textuellement quand je n'en pouvais plus d'avoir Babou accrochée à moi comme à une bouée de sauvetage. Bah, on me l'a peut-être même dit, mais je n'entendais pas; il fallait probablement que l'idée fasse son chemin.

Ça doit être ça, user de son expérience de maman... Sais-tu seulement à quel point tu es chanceux, Petit Frère?

lundi 10 janvier 2011

Accord au pluriel du mot «enfant»

Bb2, alias Petit ourson, ou encore mieux, Petit Frère comme l'a si magnifiquement baptisé Babou (alias Grande Fille), a eu six semaines.

Depuis une semaine, son papa est retourné au travail. Ce matin, sa grande soeur a repris la routine de la garderie. Depuis six semaines, je rêve d'alimenter ce blogue mais les minutes me filent entre les doigts. Ce matin, je soupire d'aise : un seul bébé à m'occuper et aucun jouet n'a bougé depuis plus de trois heures!

J'ai très hâte d'immortaliser le récit de la naissance de ce nouveau bébé, qui en ce moment, grogne dans le porte-babou et menace de se réveiller à tout instant! Je préfère attendre un moment plus propice pour le rédiger, mais en attendant, un petit résumé de notre vie à quatre s'impose :

En quelques mots, Petit Frère a un fort potentiel de bébé calme et contemplatif, mais comme il est en proie à de vilaines coliques et autres maux de ventre atroces qui le tirent de son sommeil plusieurs fois par jour/nuit, et ce, plusieurs fois par semaine, disons que mes cernes sous les yeux se rendent jusqu'en Afrique australe et ma patience est usée à 4/32 et selon l'Homme, ne passera pas l'hiver : ) (blague subtile pour ceux qui -rares j'en conviens- connaissent le monde formidable de l'usure du pneu automobile! Désolée, mon conjoint est issu d'une longue lignée de spécialistes du pneu).

Hormis sa détresse abdominale, Petit Frère a (lui aussi) de beaux grands yeux intelligents et éveillés. Déjà, il suit du regard sa grande soeur, comme s'il souhaitait participer à ses jeux et comptines (nombreux). Il gazouille, roucoule et agite vigoureusement ses bras et ses jambes quand quelque chose l'émerveille. Il sourit depuis qu'il a fêté son premier mois, mais à six semaines, on voit que ses sourires sont sentis et volontaires. Il n'existe pas de meilleure récompense pour une maman aux batteries à plat!

Petit Frère a donc aussi en commun avec Babou qu'il a la digestion ardue. Ça me désole, j'espérais sincèrement être épargnée par ces longues heures à promener de long en large un poupon rendu rigide par la douleur. Le sentiment d'impuissance parentale est à son maximum quand on voit ainsi hurler son tout-petit, et que, sans qu'on ose se l'avouer, il en vient à carrément nous taper sur le système. Difficile à gérer... Quand elle a eu environ trois mois, Babou a été exemptée de cette souffrance, souhaitons qu'il en soit autant pour Petit Frère.

On m'a dit, dernièrement, que les enfants qui souffrent de coliques dans les premiers mois de leur vie sont plus intelligents. Belle compensation, et à voir Babou, je suis tentée de croire cette affirmation un peu saugrenue...

Cette dernière, qui aura 22 mois demain, parle couramment. Sujet-verbe-complément. Cette petite m'étonne chaque jour : elle manipule déjà l'humour et sait quand nous envoyer un gag pour détendre l'atmosphère, elle nous fait part de réflexions surprenantes pour son âge, nous partage ses émotions (peine, maman! nous a-t-elle dit dans les premiers jours de vie de son frère, alors qu'elle s'ennuyait visiblement de sa paisible ancienne vie familiale à trois).

Pour l'aider dans cette adaptation, il y a la lecture et le dessin. Elle reconnaît son nom quand on l'écrit parmi nos gribouillis au crayon de bois. Elle est avide de ses livres d'histoire, les connaît par coeur (on lit ensemble, elle me dit un mot sur deux!), et nous lance des citations tirés de ses livres à tout moment de la journée.

Exemple? L'autre jour, elle me lance : Maman, ma vie a changé! (tiré du livre : Je viens d'avoir un petit frère). Très spécial d'entendre cette petite puce de même pas deux ans me partager ainsi ses émotions, parce que ça se voit dans ses grands yeux, elle comprend ce que ça peut signifier.

Et le temps des fêtes dans tout ça? Il est passé sans trop que je le vois. Épuisée, j'ai traîné ma présence fantomatique dans ma famille et ma belle-famille, puis le 27 décembre, nous sommes revenus à la maison pour ne plus en repartir. Quatre nuits à l'extérieur, c'était bien assez.

Par contre, Babou a adoré sa découverte de la magie de Noël, et s'extasie encore devant les décorations des retardataires. « Oh! Couronne de Noël! Ruban de Noël, sapin de Noël, Père Noël!» Sans compter que dans sa lettre au Père Noël, rédigée à la garderie, elle avant demandé comme cadeau... un beau sapin de Noël. Inutile de vous dire qu'elle l'a obtenu!

En vous souhaitant la bonne année 2011, je vous dis à bientôt pour de nouvelles aventures, écrites en direct de ce pyjama de polar bleu, éternel symbole de mon deuxième congé de maternité en autant d'années!