lundi 15 août 2011

La complicité

Elle en aura mis, du temps, Babou, pour digérer la présence de Petit Frère.

Dans les tous premiers jours de notre vie à quatre, j'ai eu droit à la froideur et à l'amertume d'un petit coeur brisé de 20 mois et demi. J'étais, les hormones aidant, en miettes. Avec l'impression de devoir quêter l'amour de ma petite fille, de la réapprivoiser, de me plier en quatre pour qu'elle comprenne que mon amour pour elle -- inconditionnel -- était inversement proportionnel au temps que je pouvais désormais lui consacrer.

Puis, à force d'efforts, au fil des jours, Babou a bien vu que Maman était toujours là pour elle, moyennant un peu de patience et d'autonomie. Pour elle, j'avais multiplié les petits moments de qualité. Bains ensemble, sorties au parc avec Petit Frère qui dormait dans la poussette-traîneau, histoires et jeux sitôt qu'il faisait la sieste. Tout ça a bien entendu contribué à rassurer Babou.

Tellement que j'ai eu rapidement l'impression de déshabiller Jacques pour habiller Jean, laissant parfois Petit Frère poireauter pendant que je divertissais sa grande soeur, ou accourait avec elle 36 fois par jour à la salle de bain pour prioriser son apprentissage de la propreté. Combien de tétées ai-je ainsi interrompues abruptement pour m'éviter des flaques de pipi à ramasser!

Découvrant par le fait même que mon Bb2 s'endurait nettement plus longtemps seul que ma première née, et que la simple présence d'une aînée en orbite autour de lui occupait fort bien mon poupon pendant de longues minutes.

Pendant les tous premiers mois de Petit Frère, Babou ne lui a jamais vraiment porté attention. Tout au plus un petit bisou par ci par là. Ou parfois, une petite marque de colère ou de jalousie, en bousculant les choses lui appartenant. C'est à ces signes que nous voyions qu'elle l'avait encore un brin de travers, Petit Frère.

Puis elle s'est mise à me demander où il était, quand celui ci était en sieste.

Puis je l'ai surprise à le faire rire à table, à le narguer gentiment avec sa biscotte en auto, à lui redonner compulsivement sa suce (qui semble être aimantée au plancher).

Puis à l'inclure systématiquement dans son énumération des membres de la famille. Papa, Maman, Petit Frère et Babou.

Quand on demande à Babou si elle souhaite qu'on garde Petit Frère, elle répond "oui" sans hésiter. Et nous regarde comme si nous avions eu la pire idée qui soit!

Hier, l'Homme s'affairait dans la cave. La petite jouait non loin de lui. Je devais aller chercher mon linge sur la corde avant que le ciel ne lui tombe dessus, alors j'ai amené Petit Frère jouer près de sa grande soeur.

Il y est resté près d'une heure. Les deux petits s'amusant ensemble en harmonie. Nous entendions de petits éclats de rire de bébé de temps à autres, à travers l'intarissable monologue bal-princesse-gâteau d'anniversaire-camping de Babou. J'ai même surpris Babou sur le vif, en plein flagrant délit de bisous sur la tête de Petit Frère, aussi ravi que surstimulé.

À 8 mois et demi, Petit Frère semble soudainement être devenu le complice officiel de sa grande soeur. Longue vie à ce lien privilégié propre à la fraternité!