vendredi 4 avril 2008

À l'eau, la lune!

C’était un petit matin ordinaire, pour ne pas dire banal. Debout à 7 h, pipi matinal à 7 h 01, verre de jus orange-canneberge derrière la cravate, puis préparation du café. Petit déjeuner tranquille avec l’homme de la maison, puis boulot à l’ordi, en équipe avec tasse de café. Comme d’hab, je vous dis.

Travaille, pianote sur le clavier, farfouille dans les papiers, téléphone un tel, répond à deux ou trois appels, dix ou douze courriels. Rapporte tasse de café sur le coin de l’évier, à côté de la vaisselle du déjeuner et la remplace par le litre d’eau, habituellement rempli et vidé trois fois par journée. Retourne à l’ordi, et travaille encore, interrompue par deux ou trois pauses-pipi (savez, le litre d’eau). Et tout ça en pyjama (mea culpa).

Sonnent les midis. Prépare à dîner. Un petit repas rapido, de ceux qu’on prend sur le bout de la chaise. Vide l’assiette, la rince à peine. Un commentaire fuse, adressé au pyjama et au fait qu’il est un peu abusif d’encore l’arborer à un moment si tardif. D’accord pour l’enlever, mais avant, il faut se laver.

Petit saut dans la douche, qui débite à peine trois litres à la minute. Actionne l’interrupteur de jet d’eau, même si on se les gèle. Savon, shampoing, mousse. Puis rince l’épaisse chevelure et sa propriétaire entre chaque opération houpette-savon. Comme d’hab, je vous le jure. Durée de la douche : 10 minutes. Durée de l’utilisation de l’eau : 5 minutes. Cher interrupteur…

C’est au tour de l’homme de la maison d’occuper la salle d’eau. Sa repousse de deux jours lui donne une gueule de gangster et on l’attend pour un rendez-vous important. Remplit le lavabo, muni d’un bouchon, pour empêcher l’eau de fuir. Chop! Chop! la barbe naissante, et flic flac dans l’eau, pour rincer pioche et blaireau.

Une sonnerie retentit, belle-sœur à l’appareil. « Je sors de la douche », lui mentionnai-je. « Moi j’attends après 16 h, c’est la journée À l’eau Sherbrooke.»

Gloup.

Désolant. Le seul mot qui me vienne à l’esprit à ce moment-là. Celle qui vous fait la leçon environnementale une fois la semaine, qui vous en met plein la tête avec ses beaux principes, sa bonne morale, sa chère rectitude écolo-éthique, celle-là même a trouvé le tour d’OUBLIER cet événement unique, brillant, rafraîchissant.

Raccroche la ligne, rongée de remords. Dégoûtée des ratées de cette mémoire qui a flanché malgré ce courriel reçu quatre fois dans la même journée. Malgré cette conversation s’étant tenue l’avant-veille.

Reprends ses esprits. Passe en revue ses matinales activités. Vaisselle? Non, elle traîne encore. Chasse d’eau tirée? Environ aux trois pipis, comme toujours. Douche? De courte durée, grâce à l’interrupteur. Lavage? Non, c’était hier matin, avec la frontale. Arrosage d’entrée de cour? Non, pas d’entrée de cour. Eau qui coule pendant le brossage des dents? Non, pas de dents (meuh non).

Tout compte fait, pas peu fière de ce bilan. Ici pas de sainteté, pas de bretelles claquées. Plutôt des comportements chèrement acquis. C’est possible de changer, je vous le dis, faut juste essayer.