vendredi 11 décembre 2009

Être pâtissière n'est pas héréditaire

En général, je cuisine vachement bien. Vraiment bon, ce que je mitonne. Rien de compliqué, oh ça non. Je n'aime pas dutout m'enfarger dans les convenances de balances alimentaires, douilles à glaçage, ramequins par ci, caquelon par là et tout le saint-frusquin d'usage dans les recettes à 100 $.

Mon truc à moi, ce sont les bons petits plats hivernaux qui cuisent loooongtemps. Je me réjouis, que dire, je délire à l'idée de balancer une semelle de botte dans la mijoteuse et de déguster, huit heures plus tard, une viande tendre qui s'effiloche à la fourchette, entourée de bons légumes, le tout rehaussé d'épices simples mais terriblement bien dosées.

J'éprouve aussi une affection toute particulière pour les muffins. J'en collectionne littéralement les recettes. Encore là, rien de compliqué dans la confection des petits gâteaux santé. Et en toute humilité, je les réussis bougrement bien.

Par contre, oulà, je n'excelle pas, mais alors pas du tout, dans l'art de la pâte. Pas pâte spaghetti-macaroni. Non, plutôt pâte comme dans celle qu'on taponne-mais-pas-trop, roule mais-pas-trop, enfarine-mais-pas-trop pour finalement, en priant tous les saints du ciel, décoller du comptoir en retenant son souffle, soulever en récitant un rosaire, puis engoncer dans un plat à tarte en sacrant comme un chartier. Pâte à tarte pour les intimes, donc.

J'haaaaaaaaguiiiiis faire d'la pâte à tarte, au point de m'en réveiller la nuit.

Paradoxalement, je cultive en même temps que ma sainte-horreur de la pâte à tarte un orgueil presque malsain sous forme de véritable lutte intérieure entre ma haine et mon moi-même et dont l'issue est toute simple : pas question que j'achète de la pâte toute faite. No way les marmitons. Quitte à blasphémer jusqu'à en perdre mon dentier.

Il faut dire que ma grand-mère en faisait une inoubliable. Avec sa dizaine de mioches, elle n'a disons pas eu trop le choix de faire de l'excellente pâte à tarte. Chez elle, je ne me souviens pas d'un repas ne se terminant pas par une tarte, toujours délicieuse, feuilletée, coquette, parfaite.

Tout un contraste avec mon amas informe façon patchwork, fendillé, rapiécé, trop manipulé, inégal, disloqué, disjoint, douloureusement différent des oeuvres d'art en dentelle de farine et saindoux de grand-maman.

Si ma pâte est un truc moche et difficile à manier :

-est-ce la faute de cette super farine de blé entier bio que je m'entête à utiliser par souci d'apport en fibres (ridicule, j'en conviens, puisque saindoux arrive en deuxième dans la liste d'ingrédients)?

-est-ce parce que je ne mets pas assez d'eau? farine? gras (impossible)?

Non.

Je vais vous le dire, moi, pourquoi ma pâte à tarte ne gagnera jamais de concours.

C'est à cause de ma mère. Ou plutôt, de mon père. Qui, alors qu'il était jeune marié, s'est foutu de la gueule de la tarte aux bleuets que venait de concocter ma mère (digne fille de la fée pâtissière plus tôt mentionnée). Semble-t-il que ladite pâte à tarte tenait davantage du papier cellophane que de la délicieuse croûte dorée et feuilletée, à tel point qu'on en voyait les jolis p'tits bleuets à travers.

Depuis ce jour, ma mère tente de survivre avec sa hantise de la pâte à tarte. Qui semble être devenue, ma foi, une véritable tare génétique.

Vraiment, être pâtissière n'est pas héréditaire.

1 commentaire:

a dit...

pour le croire il faudrait le voir ;-)