jeudi 11 mars 2010

Un an plus tard... la naissance de Babou

Chère petite Babou,

Il y a un an, j'étais affalée sur le divan avec un gros bol de popcorn. C'était un soir de pleine lune et ton papa et moi, nous regardions une émission insignifiante à la télé. Pendant une pause publicitaire, je lui ai fait part d'un tiraillement que je ressentais dans une hanche...

Vers 22 h, nous sommes allés au lit. Je me suis endormie comme une bûche. C'est un autre tiraillement, dans le ventre cette fois, qui m'a tirée de mon sommeil. 23 h 30. Même histoire à 23 h 35, puis à 23 h 40. Me doutant bien de ce qui se tramait, j'ai averti ton papa que tu te préparais fort probablement à arriver parmi nous. Il est immédiatement allé me faire couler un bain, dans lequel j'ai mariné une vingtaine de minutes, juste assez pour confirmer que mes contractions s'intensifiaient. Après avoir téléphoné à la maternité, qui nous attendait, nous avons plié bagage.

Entre deux contractions, j'ai appelé ma maman à moi. Il était environ une heure du matin, je l'ai réveillée, bien entendu, mais qu'importe, je tenais absolument à ce qu'elle pense à moi durant les heures à venir. Puis nous sommes partis, ton papa et moi, pour l'hôpital, sous une petite neige fondante de début mars. Nous ne t'attendions que pour le 15, soit quatre jours plus tard. Dans quelques heures, je t'aurais dans mes bras, toi le petit garçon aux cheveux noirs ébouriffés que je voyais dans presque tous mes rêves depuis des mois. Toi mon petit Éloi.

En route, j'ai eu deux ou trois contractions. Ton père a fait une farce quelconque - je ne me souviens plus de quoi il s'agissait au juste - mais je ne l'ai pas trouvée drôle. Je lui ai dit que c'était la dernière blague qu'il faisait pour le reste de mon accouchement. Même au tout début du travail, je n'avais pas tellement envie de rire!

Ton papa est arrivé en trombes devant l'entrée des urgences. Il m'a assise dans une chaise roulante pour monter à la maternité. Je n'ai que très peu de souvenir de mon arrivée à l'hôpital. Si ce n'est que dans la salle de tri, je ne savais pas trop comment me placer pour supporter mes contractions, encore aux 5 minutes. Après environ un siècle d'attente, mon médecin m'a examinée et nous a confirmé ce que nous savions tous : tu serais parmi nous dans les prochaines heures! "Tu veux accoucher naturellement? Je vais t'aider à y arriver", m'a dit la merveilleuse Dre Bissonnette.

La suite est longue. Car c'est long, mon bébé, un accouchement. Et puis ça fait mal. Mais la douleur est compensée par la hâte de rencontrer la cause de tout ce mal. Pendant ce qui m'a semblé des heures, ton papa et moi avons marché dans les couloirs de l'hôpital. À chaque contraction, je m'appuyais sur les rampes le long des murs et lui me massait le dos, avec une huile qui sent tellement bon la lavande et que j'avais acheté exprès pour accoucher.

Puis j'ai obtenu mon admission à l'hôpital, et on m'a assigné une chambre. Avant de m'y rendre, je suis allée dans le grand bain, pour essayer de changer le mal de place. Comme seuls les massages de ton papa me soulageaient et qu'étant à côté du bain, il ne pouvait s'exécuter, je suis assez rapidement sortie de l'eau pour retourner dans la chambre. Papa a repris du service avec ses massages et points de pression. Après chaque contraction (ce qui faisait bien rire ton papa et les infirmières), j'avais le hoquet et mon corps était parcouru de frissons. Vraiment, je ne contrôlais plus rien dans mon corps!

Vers 6 h du matin, j'ai demandé à ton papa de téléphoner ta marraine pour lui dire que tu t'en venais. Je lui ai aussi dit d'appeler Geneviève, notre très chère amie qui voulait tant assister à ta naissance et immortaliser chaque moment avec son appareil-photo. Jusqu'à la dernière minute, j'avais hésité à accepter son offre. Puis ce matin-là, j'ai eu la certitude d'avoir besoin d'elle, de son expérience et de sa présence bienveillante.

Comme il n'a pu la rejoindre, vers 8 h 30, je lui ai redit : rappelle Geneviève. Elle s'apprêtait à quitter la maison quand elle a eu notre appel. Elle est arrivée très peu de temps après, discrète, professionnelle, indispensable. Entre deux photos, elle a aidé ton papa à me soulager avec des compresses d'eau chaude, des conseils. Ton papa, fatigué et ému, a accueilli avec soulagement ce précieux renfort, surtout que ma situation devenait de plus en plus inconfortable. Voire atrocement douloureuse.

Nous étions le 11 mars en avant-midi. À plusieurs reprises, dans un brouillard d'endorphines, j'ai demandé "est-ce que ça achève? ". Oui, oui, ça va bien, ça achève, me répondaient les infirmières, ton papa et mon amie. Heureusement, je les croyais, car ce petit jeu a duré jusqu'à ton arrivée, soit quatre heures plus tard!

Dans la chambre jouait en boucle un disque de chants tibétains. Ton père a suggérer de changer de disque. Je lui ai clairement signifié mon désaccord, j'avais besoin de ce long chant monocorde pour me concentrer.

Puis est venu le moment tant attendu, celui de te donner la vie. Quand mon médecin, accompagné de sa stagiaire sage-femme, a décrété que l'heure était venue, j'ai ressenti un immense soulagement. Je venais de passer presque une heure à retenir les poussées naturelles, mon col n'étant pas complètement dilaté (et mon médecin en train d'assister une autre maman). Ce fut à mon avis le moment le plus difficile de tout l'accouchement.

Le moment de la poussée m'a donc paru un moment où ENFIN je pouvais faire quelque chose d'autre qu'attendre et me retenir. Selon ton papa, du moment où mon médecin m'a donné le ok pour pousser, je me suis exécutée trois, quatre, cinq fois? Semble-t-il que ce fut très rapide, on a vu ta tête arriver. Puis hop, tes épaules, et finalement, tout ton corps. L'horloge indiquait 12 h 47.

À travers ses larmes, ton papa a coupé le cordon en s'exclamant que tu étais une fille! Une petite fille! Quelle surprise! Pendant tous ces mois, le petit bibi que je couvais n'était donc pas un garçon!? Étant moi-même la seule fille arrivée après une série trois garçons, j'avais évacué la possibilité d'avoir moi-même une fille en guise de premier-né. Tu étais là, couchée devant moi et tu nous racontait ces sales moments que tu venais de vivre en hurlant. Tu avais la peau toute rouge, tu étais encore enduite de vernix. Je t'ai prise dans mes bras après qu'on ait eu coupé le cordon, trop court pour que je te prenne aussitôt sortie de mon ventre. Tu étais légère, vigoureuse et ta petite bouille ressemblait déjà à celle de ton papa (ce qui n'a pas changé!).

J'ai respiré ton odeur et j'ai dit : "Tu sens les petits biscuits Feuille d'Érable". C'était tellement vrai! Tu as porté cette odeur enivrante pendant au moins deux jours.

Pendant que les infirmières, la stagiaire sage-femme et le médecin s'affairaient sur le petit paquet livré express, ton papa ne cessait de répéter "Elle est donc bien cute!" Lui-même était sous le choc d'avoir assisté à la naissance d'un si beau bébé, sa petite fille.

Et moi, éberluée et épuisée, j'ai repris mon souffle et savouré ce moment de délivrance, après treize heures de souffrance parfois intenable.

Ensuite, expulsion du placenta (DÉLIVRANCE totale!), points de suture. Mon médecin et la stagiaire sage-femme m'ont embrassée et félicitée avant de quitter la chambre, et j'en ai été fort émue. J'ai appris un peu plus tard que mon médecin venait de vivre un 48 h de garde merdique, mais que mon accouchement naturel réussi a "bien terminé sa garde", et qu'elle en était toute contente. Ce sont ses propres mots.

Le reste de la journée me semble flou. Bizarre, quand même que ce qui me reste de cette journée remplie d'émotion est un souvenir vague et décousu. J'aurais aimé me rappeler de chaque seconde... Je mets ça sur le compte de l'épuisement. Par chance, une série de photos, prises par Geneviève, m'ont permis de recoller les morceaux de l'histoire de ta naissance. On peut y lire l'émotion comme si on y était. Quel beau souvenir que m'a offert mon amie...

Le plus beau jour de ma vie, c'était il y a un an.

Bon premier anniversaire, petit cadeau du ciel...

Ta Maman xxx

5 commentaires:

Anne a dit...

J'ai eu une pensée pour vous, aujourd'hui! Facile de se souvenir de la date, hein!

Je souhaite un bel anniversaire à ta Babou! A-t-elle pu se délecter d'un gâteau au chocolat ou aux carottes, finalement?

Grosses bises et au plaisir de vous rencontrer en personne un jour!

Anne xxx

Karine Auteure de Cinq Fourchettes a dit...

Vilaine! J'ai l'air fin moi au boulot les yeux débordant d'eau!
Merci de m'avoir offert l'opportunité de vivre une telle expérience.
XXX

Ysa_la_tite_mere a dit...

C'est beau!
Ah, l'odeur d'un bébé naissant! Ça donne le goût d'accoucher encore et encore

a dit...

Quelle belle histoire, toute en douceur! Merci de nous l'avoir racontée et bon début de deuxième année de vie à miss Babou
xx

Grande-Dame a dit...

Quel joli récit ! Bien émouvant...