jeudi 27 septembre 2007

Chaque petit geste compte?

Vraiment? Pourtant, cette litanie cent fois remâchée par les environnementalistes est fréquemment remise en doute. Dans quel contexte? Tiens, prenons l’exemple la journée mondiale « En ville sans ma voiture », qui se tenait le 20 septembre dernier. Un jour durant lequel les rues des centres-villes de 1500 cités, à travers 138 pays, ont été fermées à la circulation motorisée. À Sherbrooke, c’était le campus de l’Université qui avait considérablement réduit l’accès aux voitures.

Pour une septième année consécutive donc, le temps d’un simple 9 à 5, le champ était libre pour les vélos, piétons, poussettes et patins à roues alignées. Or cette seule journée a suscité les passions, attisé les foudres, relancé les débats, choqué et dérangé.

Mais quel est le but, au juste, de toutes ces simagrées environnementales? De mettre des bâtons dans les roues des automobilistes qui habitent loin du point B? De remplir les transports en commun à trop pleine capacité, jusqu’à écoeurement total d’une clientèle coincée, tassée, bousculée? De faire pédaler des employés ankylosés, soufflant sur des bécanes mal ajustées? Certainement pas. Mais c’est assurément ce qui arrive chaque fois. Et chaque fois, on se demande si un petit geste, un simple geste isolé, peut VRAIMENT faire le contrepoids à la fumée noire de telle industrie. Au gaspillage d’eau éhonté de telle usine. À la surutilisation de papier de telle autre tour à bureaux. Et ça, ça énerve.

L’objectif d’une telle journée n’est pourtant pas de générer des légions d’ennemis de la cause, mais plutôt de sensibiliser. De montrer qu’il existe autre chose que ce que l’on prend pour acquis les 364 autres journées de l’année. Efficace? Oui. Mais reste que la sensibilisation demeure un processus long, difficile et hasardeux. Souvent, très souvent, les résultats sont mitigés, ne se font pas voir instantanément. À preuve, combien d’années se sont écoulées entre la découverte des méfaits de la cigarette sur la santé et l’interdiction de fumer dans les lieux publics? Combien de millions de dollars ont été investis dans les campagnes anti-tabac? De la même façon, en environnement, il faut d’abord sensibiliser au lieu d’interdire bêtement. Et ça, ça se fait petit peu par petit peu, qu’on le veuille ou non.

Pourquoi j’éteindrais le moteur de ma voiture en attendant ma douce moitié? Le conducteur de ce camion laisse bien, lui, tourner son moteur au ralenti depuis vingt minutes? Pourquoi devrais-je couper le contact pour dix fois moins de temps? Pourquoi je n’arroserais pas ma pauvre pelouse jaunasse et desséchée pendant toute la nuit? Mon voisin, lui, inonde bien son entrée d’asphalte même sous une pluie diluvienne! Pourquoi s’acharne-t-on toujours sur mes petits gestes à moi, le citoyen, quand les grandes industries se croient tout permis?

Peut-être parce qu’à la tête de toute industrie, il n’y a point d’androïde, mais plutôt une voisine, un oncle, un fils, une mère. Pour cette personne dirigeante, une simple signature au bas d’un formulaire peut devenir ce petit geste tant espéré par les environnementalistes. À chacun son petit geste. À chacun de faire sa juste part, à la mesure de ses moyens.

mercredi 19 septembre 2007

Conscience environnementale au féminin

Mesdames, cette chronique s’adresse à vous. Ouvrez grands vos yeux et votre esprit. Et vous messieurs, tut! tut! tut! Ne fuiez pas! Vous avez une femme, une fille, une copine, une sœur, une collègue. Bien entendu, leur bien-être physique, leur santé financière et leur comportement environnemental vous tiennent à cœur. C’est donc par la bande que ce billet vous concerne aussi.

Abordons aujourd’hui l’inévitable question de la protection hygiénique. Au même titre que les couches de coton côtoient celles que l’on envoie au panier, une pléthore de protections féminines, réutilisables ou pas, sont disponibles sur le marché. Vous avez bien lu, les méthodes durables de gérer les cycles de la féminité effectuent un retour en force. Pourquoi?

Parce que les chiffres font frémir. On évalue que chaque dame utiliserait, dans sa vie, entre 10 000 et 15 000 tampons ou serviettes sanitaires jetables. Bonjour les déchets. Or, nombreuses sont-elles à faire changer les statistiques. Mais diantre, qui sont ces hurluberlues? Des intégristes environnementales au regard fou? Même pas. Bon, d’accord, il y a celles qui ont déjà le penchant écolo. Seul l’argument de cesser de remplir la poubelle de la salle de bain leur suffit pour chercher une alternative à ce que l’on jette tous les mois. Mais qui sont les autres?

Celles qui en ont simplement soupé de placer côte à côte, dans le panier d’épicerie, boîtes de tampons et pied de céleri. La protection féminine en coton, lavable et réutilisable jusqu’à amen, leur semble une option intéressante, tant pour le prix que pour la simplicité d’utilisation. On les passe simplement à la machine à laver, à sécher, et l’affaire est classée.

Celles que le soi-disant confort et la prétendue efficacité des produits jetables ne concernent pas joignent aussi les rangs dissidents. Il y a en effet un monde entre la jouvencelle tout de blanc vêtue qui, au jour 1 de ses règles, gambade dans les champs, et l’adolescente tordue de douleur qui, en plein cours de géo, a le désagréable pressentiment que le seuil d’absorption de sa serviette maxi contour vient d’être atteint.

Lassées des débordements insidieux, quantité de femmes se tournent alors vers la révolutionnaire coupe menstruelle, qu’on porte comme un tampon qui recueille au lieu d’absorber. De deux à quatre fois par jour, on la vide et la rince, sans plus. L’avantage de ce bidule de caoutchouc naturel ou de silicone est son incontestable confort. Passé les trois mois d’adaptation à la gymnastique insère-enlève, les sportives, les voyageuses et les amatrices de plein air aimeront son aspect pratique : rien à traîner, ni déchets, ni protection supplémentaires.

Finalement, celles qui n’en peuvent tout simplement plus de jeter les dollars par-dessus bord apprécieront de débourser environ quarante dollars pour la coupe menstruelle et de 2 à 6 $ l’unité pour les serviettes lavables. Toutes les raisons sont bonnes pour prendre le virage vert jusque dans sa féminité. Il suffit simplement d’essayer.

lundi 17 septembre 2007

Retour vers les ordures

6 novembre1985. Vêtu d’un long manteau argenté, le visage couvert de larges lunettes miroir, le docteur Emmett Brown rentre en coup de vent d’un court voyage dans le temps. Il gare avec fracas sa DeLorean volante devant le domicile des McFly, sous le regard ahuri des tourtereaux Marty et Jennifer. Deux instants plus tard, il ouvre le capot et fait le plein à même la poubelle. Une peau de banane et quelques millilitres de vieille bière plus tard, la rutilante bagnole adaptée à la mode 2015 est prête à transborder tout ce beau monde à destination du futur.

Les amateurs auront reconnu la dernière scène du premier épisode de Retour vers le futur. Science fiction? Exagération? Délire de cinéaste? Pour ce qui est de la voiture volante et du trench coat façon patate au four, peut-être. Mais moins en ce qui concerne la DeLorean carburant à même les détritus de George et Lorraine McFly. Plaît-il? Que de l’huile à friture fasse avancer les voitures passe encore, mais les ordures?!

N’en déplaise aux âmes sensibles, les Suédois ont eu l’idée, en apparence farfelue, de se servir à même l’alcool de contrebande saisi aux frontières pour faire avancer leurs chers véhicules scandinaves. Il faut dire que ce pays n’est pas né de la dernière pluie en matière d’environnement et est souvent cité en exemple quand il s’agit d’innovations vertes. Que cette portion de terre des latitudes nordiques pousse encore plus loin la science des poubelles n’a donc rien de surprenant.

Dans le site sweden.se, consacré à ce petit pays de quelque 9 millions d’habitants, on mentionne donc que tout l’alcool bon marché, confisqué parce qu’acheté hors les murs, n’est plus, comme auparavant, balancé à l’évier. Bières, grands crus, piquettes et autres spiritueux aboutissent dans un grand contenant, où ils sont ensuite mélangés à des résidus d’abattoir et autres ingrédients qui alimentent habituellement nos bacs roulants.

Cette édifiante purée est ensuite chauffée et maintenue dans un milieu anaérobique (en absence d’oxygène) pendant environ un mois. Ce ragoûtant processus de décomposition produit enfin le précieux biogaz qui est ensuite utilisé pour faire avancer taxis, autobus et même un train.

Mais pourquoi se donner tant de mal quand on peut simplement aller faire le plein à la pompe à essence du coin? Ce n’est quand même pas demain la veille que l’on pourra, comme Doc Brown, faire voler les voitures à grand renfort de fonds de tonne et de peaux de bananes! Peut-être, mais gardons tout de même à l’esprit que le pétrole de nos automobiles est une ressource épuisable, qui a pris des centaines de milliers d’années à se former dans les entrailles de la terre mais a presque tout été extraite du sol en un siècle et des poussières.

Il fallait s’en attendre, à force de piger dans le tas, les provisions s’amenuisent. Mais pas les déchets. D’où l’intérêt d’en faire le prochain or noir. Tout cela tient maintenant de la science, et non plus de la fiction.

Argent jetable ou solution durable?

Jadis, il y a de cela fort longtemps, quand les grands-mères de nos mères étaient encore au berceau, les linges de maison étaient faits à la main et conçus pour durer. Avec le fil on tissait les étoffes, à partir desquelles on cousait les vêtements. Avec les chemises râpées et les pantalons troués on faisait les torchons qui, une fois usés, étaient tressés en d’inusables tapis d’entrée.

De la couche de bébé au mouchoir pour le nez, de la vadrouille à plancher à la lavette à vaisselle, tout était issu d’une bobine de lin, de laine ou de coton, que l’on passait par le métier à tisser ou les aiguilles à tricoter. Puis vint l’époque où les mères de nos mères, jeunes mariées, ont commencé à aller travailler. Le temps nécessaire pour confectionner les linges de maison étant plus difficile à trouver, des alternatives sont arrivées sur le marché.

Couches et protection féminines à utilisation unique, serviettes de table, mouchoirs et essuie-tout de papier sont peu à peu venus déclasser leurs équivalents, qu’on devait auparavant rendre propre en s’éreintant sur la planche à laver. Le côté pratique a rapidement fait changer les mentalités : il valait mieux payer un peu plus pour frotter un peu moins.

Peut-être bien. Mais quand on s’arrête pour y penser, ces produits jetables, qui certes nous permettent de sauver du temps, nous font, quoi qu’on en dise, jeter nos sous par les fenêtres. Comme si, entre deux éternuements, je me mouchais directement dans mon argent. Faut-il alors jeter le bébé avec l’eau du bain? Envoyer valser les mouchoirs avec le rouleau de papier de toilette et les essuie-tout avec les protège-dessous?

Sans tirer un grand trait sur tout ce que m’offre la modernité, où dois-je m’arrêter? Suis-je obligée d’utiliser quatre essuie-tout pour éponger le raz-de-marée de mon café, quand le torchon de cuisine peut accomplir aussi bien le même travail? Dois-je laisser mes invités s’essuyer le bec dans des serviettes de papier quand j’en ai une douzaine, en tissu cette fois, qui dort au fond de mon vaisselier? Les lingettes démaquillantes que je me procure à vil prix font-elles réellement mieux l’affaire qu’une débarbouillette et un peu de lotion?

Oui, les produits jetables nous donnent de fichus de bons coups de main. Évidemment qu’ils nous dépannent en camping, au bureau et dans l’auto! Nous serions un peu timbrés de nier à quel point le papier hygiénique nous est précieux, voire indispensable. Il est toutefois bon de se rappeler que pour presque chaque produit jetable existe une solution plus durable. Que tout ce qui est fait à base de papier signifie que des arbres sont coupés simplement pour être jetés.

Avant de mettre mon argent au panier, je pense à une bonne façon de l’investir dans une solution longue durée. Sinon, je choisis des produits utilisant des fibres 100 % recyclées. Il en va de la santé de la forêt… et de mon porte-monnaie.