mardi 8 mai 2007

Le Québécois sans peine

Mon séjour en France « passe aux toasts ». Ici, la moindre petite heure vécue à Paris pourrait largement noircir la présente colonne.
Et pourtant. Même si la semaine dernière, c’était « ma fête » (personne n’a compris, ici on dit anniversaire) et que je suis tous les soirs « partie en gorouage » à « manger à l’heure des monsieurs » et à « dormir sur la corde à linge », voilà que je cherchais ici quoi vous narrer de savoureux.
Je vous ai déjà raconté les paysages et les festins. Vous savez même que mes vêtements commencent à « me péter sur le corps ». Mais sachez ceci qu’ici je ne fais pas que « varnousser » en « gougounes » sur les champs Elysées.
Avant tout, je suis « dans les Uropes » pour le boulot : j’ai donc droit à mon petit 9 à 5 tout ce qu’il y a de plus stable, prévisible et inflexible. Invariable même.
Or comme j’ai l’angoisse du jour de la marmotte, j’ai décidé d’y mettre du piquant en initiant une nouvelle tradition, qui a aussitôt « tapé dans le dash » de mes collègues français : « Le québécois sans peine ».
Cela va comme suit.
Je parle.
Oui, je m’exprime.
Je me fais « aller le mâche-patate ».
Ma sélection d’expressions bien de « che nous » est vite devenue le pain quotidien des comparses de travail.
Je n’ai qu’à « m’ouvrir la trappe » et cela leur permet de visiter le Québec et ses confins les plus reculés « pour gratisse ».
Ma chaise est « sur le cant » ? L’hilarité générale s’installe.
Pour entrer dans l’usine où je travaille, on doit enfiler l’élégant bonnet de papier et le seyant sarrau XXL. « J’ai l’air de la chienne à Jacques ». Tonnerre d’applaudissements.
« Avoir de l’eau dans la cave » et « le cœur sur la flotte » font les délices de mes petits Français, conquis par le verbe imagé que je leur sers jusqu’à plus soif.
Au « top du top » se trouve d’ailleurs « vâ donc jouer dans le trafic », suivie de très très près par « se faire pogner les culottes baissées », laquelle a, après traduction, suscité gorges chaudes et remarques salées.
« Avoir les oreilles en porte de grange » n’est pas en reste, récoltant autant de bons ha !ha ! bien sentis que « organisé à la broche à foin ».
Quand « j’embarque dans un char », je n’en finis pas de me surprendre à quel point les conducteurs d’ici arrivent à faire « virer sur un dix cennes » n’importe quel gabarit de voiture.
Dans ce pays où on ne « barre » jamais les portes (on VERROUILLE), les filles sont « montées sur des frame de poule » et souvent « amanchées pour veiller tard » même si elles se « bourrent la face » de pain. Et pour 3 petits euros, il y a moyen de « virer toute qu’une brosse ».
Constat 1 ? On ne parle pas « pantoute » la même langue.
Constat 2 ? Je commence sérieusement à « passer à travers » ma réserve d’expressions.
« Vous pourriez tu m’en garocher une couple ? »

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